Jamais, au Mali, deux pouvoirs, à savoir l’exécutif et le judiciaire, ne se sont adonnés à un spectacle aussi dérisoire que nuisant pour le peuple que sous IBK. Les magistrats en grève, pour réclamer la mise en application du protocole d’accord signé en 2014 pour des meilleures conditions de travail, n’ont eu comme réponse de la part du Gouvernement que mépris et indifférence ; toutes choses qui ont irrité une partie de l’institution judiciaire, qui a durci le ton en décrétant une grève illimitée.
Ce débrayage en cours depuis plus d’un mois, a connu un tournant en début de semaine avec deux communiqués. Le premier émanait du gouvernement et faisait état de la suspension des salaires du mois de septembre chez les magistrats ; le second, qui était une réponse du berger à la bergère, venait des magistrats grévistes qui, tout en acceptant la décision du gouvernement conformément à la législation, menacent de porter plainte contre le ministre des Finances, signataire dudit communiqué, pour détournement de fonds public.
Pour les responsables syndicaux, ceux qui prônent l’exemplarité doivent être les premiers à l’abri de tout reproche. Par conséquent, ils exigent que toute la lumière soit faite autour des 3,5 milliards de F. CFA évaporés curieusement dans la nature à l’hôtel des Finances à l’occasion du prétendu dédommagement d’un opérateur économique, consécutivement à la crise au nord du pays. Ce jeu de ping-pong, qui n’est pas digne d’une démocratie où les institutions marchent à souhait, ne fait que ternir davantage l’image déjà écornée du régime en place. Sinon, comment comprendre qu’un gouvernement, se prétendant sérieux, puisse remettre en cause sa signature, au motif qu’elle a été apposée par un ministre de la Justice qui n’est plus dans le gouvernement. Le principe de la continuité de l’Etat serait-il en vacance ? Quant aux Magistrats, pourquoi avoir attendu qu’ils soient dos au mur pour brandir la menace de poursuite pour détournement, alors même qu’ils avaient la possibilité de s’autosaisir en temps plus serein ? Leur communiqué, et surtout la menace de poursuite contre le ministre des Finances, loin de les grandir, n’a fait que confirmer l’opinion la plus répandue, celle qui consiste à dire que la plaie de notre démocratie et de l’Etat de Droit réside en partie au niveau des hommes en robes noire et rouge.
Bien que les magistrats aient raison sur le fond, ils n’arrivent toujours pas à avoir la sympathie de l’opinion publique. Pourquoi ?, parce qu’ils ne semblent pas avoir une bonne presse, et pour cause. Il est désormais fort à parier, qu’à ce rythme, nous assisteront à un bras de fer entre le gouvernement et les syndicats des magistrats, lequel rappellera la cessation de travail des agents de la santé : après avoir observé 38 jours de grève qui ont occasionné la mort directe et indirecte de centaines de personnes, faute de soins, ils ont repris le travail sur un match nul. Les magistrats, à cause de leur arrêt de travail, provoqueraient également une surpopulation carcérale qui, à la longue, pourrait provoquer des bousculades ou autre étouffement
A-t-on encore besoin de rappeler à nos autorités politiques et judiciaires, que c’est au nom du Peuple que les unes exercent le pouvoir et que les autres disent le droit. Un peuple ignoré aujourd’hui par les deux. La démocratie et la liberté ont-elle encore un sens ?
Youssouf Sissoko
Source: Inf@Sept