Pour un pacte social de stabilité au Mali, le Directeur du Bureau de Pays de l’Organisation internationale du Travail (OIT) à Abidjan, Frédéric Lapeyre, a tracé 7 pistes stratégiques à explorer pour que la conférence sociale dans le domaine du travail soit une réussite.
Comme première piste, une meilleure structuration du dialogue social avec comme objectif final la création d’un cadre permanent tripartite. Car le Mali ne dispose pas encore d’une structure stratégique de pilotage et de promotion du dialogue social pour lui permettre de faire aux défis du monde du travail dans une approche structurante. Aucune institution n’est dédiée à la prévention des conflits sociaux à un niveau stratégique. Une réflexion dans ce sens pourrait porter des fruits.
-La deuxième est la clarification du paysage syndical par la détermination de la représentativité syndicale. Selon lui, la dynamique syndicale pluraliste qui caractérise le Mali oblige, pour mieux structurer le dialogue social, d’aller vers la mise en place d’un processus pour déterminer la représentativité syndicale. La non-détermination de la représentativité est de nature à exacerber les divisions et, in fine, mettre en danger le dialogue social. Il y a lieu d’agir. Et c’est aussi mon rôle ici de rappeler les observations de la CEACR publiée lors de la 110ème session de la CIT en juin 2022 qui portaient notamment sur la tenue des élections professionnelle et précisaient : « La commission réitère le ferme espoir que le gouvernement sera prochainement en mesure de faire état de la tenue des élections et que leurs résultats permettront de déterminer sans ambiguïté les organisations représentatives aux fins de la négociation collective à tous les niveaux. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut solliciter l’assistance technique du Bureau à cet égard ». Je voudrais à ce sujet attirer votre attention sur la pertinence des recommandations qu’avaient formulées la mission de haut niveau du BIT de juin 2015, à la requête du gouvernement malien, afin de trouver une solution au problème de la représentativité des organisations professionnelles des travailleurs qui, depuis trop longtemps, met à mal le dialogue social. Nous espérons que les travaux de cette conférence sociale en feront bon usage.
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La troisième piste concerne la formation des acteurs. Il y a un profond renouvellement des acteurs qui animent les relations professionnelles au Mali mais il n’existe aucune stratégie de formation ou de renforcement des capacités des acteurs en matière de dialogue social et sur les autres thématiques essentielles du monde du travail.
La mise en place d’initiatives volontaristes est la quatrième piste, selon lui. La négociation d’une trêve sociale, la signature d’un pacte de stabilité ou l’adoption d’une feuille de route pour la dynamisation du dialogue social peuvent permettre de rebâtir la confiance, pacifier le front social et de l’encadrer avantageusement.
La cinquième piste, indique-t-il, est la promotion de la négociation collective, c’est-à-dire l’actualisation des conventions collectives ou la mise en place de nouvelles conventions collectives pour des secteurs non couverts ou émergents peuvent être de grands facteurs de prévention et de pacification des relations de travail.
A ces pistes s’ajoutent l’organisation des travailleurs et employeurs de l’économie informelle qui est la sixième piste. Il est essentiel pour cela de renforcer les capacités des organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs, à représenter et à aider les travailleurs et les unités économiques de l’économie informelle, en vue de faciliter la transition vers l’économie formelle et le travail décent. Mais il faut, dans le même temps, que les autorités nationales mettent en œuvre des politiques multidimensionnelles de formalisation avec la participation active de ces organisations. La Recommandation no.204 fournit à cette fin des principes directeurs essentiels.
Quant à la politique de rémunération dans les secteurs public et privé, la septième solution, il faut s’assurer ici que le niveau des salaires soit suffisant pour promouvoir un niveau de vie décent, et aussi qu’une meilleure qualification des travailleurs permette de meilleurs salaires. Mais le salaire est aussi un coût pour les entreprises et il faut s’assurer de leur viabilité lorsqu’on fixe le ou les niveaux de salaires. Par ailleurs, dans le secteur public, il existe des contraintes budgétaires qui doivent impérativement être prises en compte. C’est pourquoi le dialogue social et la négociation salariale revêtent une importance capitale. Et la négociation salariale doit être menée dans l’optique de promouvoir le bien-être des travailleurs, la durabilité des entreprises ainsi que le développement et la stabilité économique du pays.
Cyril Roc DACK/Icimali.com