Les crimes de sang viennent en tête: un assassinat, neuf coups mortels, six meurtres, deux cas d’empoisonnement, un parricide.
Les travaux de la première session de la Cour d’assises de l’année judiciaire 2018-2019 ont débuté, lundi dernier, à la Cour d’appel de Bamako. La « Salle Boubacar Sidibé », parée aux couleurs nationales, a accueilli la cérémonie d’ouverture présidée par le premier président de la Cour d’appel, Mohamed Abdrahamane Maïga. C’était en présence du Procureur général (PG), Idrissa Arizo Maïga et de nombreux autres conseillers. Des responsables des forces de sécurité, des autorités communales et de nombreux membres de la famille judiciaire ont pris part à l’événement. Pendant un mois, les jurés vont se pencher sur quatre-vingt-douze dossiers dont quatre reviennent sur les intérêts civils. Soit 88 affaires pour un total de 121 accusés. Les crimes de sang viennent en tête: un assassinat, neuf coups mortels, six meurtres, deux cas d’empoisonnement, un parricide. Suivent un cas de coups et blessures volontaires aggravés avec mutilation et un cas d’infanticide.
Dans le chapitre des infractions contre les mœurs, les juges doivent éplucher dix cas de pédophilie et onze de viol. Les infractions contre les biens figurent également au rôle. Ainsi dix dossiers se rapportent aux vols qualifiés et associations de malfaiteurs. Les atteintes aux biens publics sont au nombre de deux pour trois cas de faux et usage de faux.
Actualité oblige, dix présumés terroristes doivent comparaître alors que quatre trafiquants de stupéfiants sont attendus à la barre et autant d’accusés pour « traite de personne et enlèvement ».
Un dossier rare lors des audiences d’assises est celui d’ « exploitation organisée de la mendicité ». Et pour la présente session, les jurés examineront un seul cas.
Six assesseurs, dont une femme, tirés au sort vont siéger aux côtés des juges professionnels. Comme l’exige la loi, ces derniers ont d’abord prêté serment avant d’être renvoyés dans l’exercice de leur fonction. Tout comme les juges professionnels, eux aussi sont tenus d’examiner scrupuleusement les dossiers des accusés. Ils ne doivent céder ni à la haine, encore moins à la crainte. Ils ne doivent écouter que leur intime conviction. Mais par-dessus tout, ils sont tenus de garder le secret des délibérations, même après la session.
Le Procureur général, près la Cour d’appel de Bamako, Idrissa Arizo Maïga, a regretté que les violations les plus graves de la loi passent pour des banalités et qu’il n’y a plus grand monde qui s’en émeut. Selon lui, « plutôt que de s’en émouvoir, de s’en inquiéter ou de s’en indigner, on s’en délecte goulûment sur les réseaux sociaux, avec le plaisir inconscient que chaque jour apporte son drame plus croustillant que le jour d’avant, l’appétence du citoyen pour le sensationnel toujours inextinguible ». « L’illustration la plus patente de cette situation, c’est qu’à l’occasion des Cours d’assises et depuis longtemps, les rôles sont envahis par les crimes de sang, c’est-à-dire les atteintes à la vie et à l’intégrité physique de la personne humaine, ce qu’il y a de plus sacré », a regretté le procureur général. Et le magistrat de s’interroger si, toutefois, un tel péril ne doit pas interpeller.
Idrissa Arizo Maïga n’a pas occulté les autres sources d’insécurité qui menacent fortement les citoyens. Selon ses propres mots, il s’agit de cette race de malfrats prosaïquement appelés spéculateurs fonciers, de vrais prédateurs qui, dans leur témérité, n’épargnent personne, même pas l’Etat à fortiori le citoyen ordinaire. C’est pourquoi, le procureur général a déclaré qu’il est regrettable que des citoyens désarmés et désappointés face à des adversaires singuliers, se retrouvent à valser entre les juridictions en quête de solution à leurs problèmes.
Tout comme le PG, le premier président de la Cour d’appel, Mohamed Abdrahamane Maïga, a également dénoncé les dérives dans notre pays (le désordre, l’incivisme, le gâchis, l’impunité). Pour lui, le remède à ces maux dont souffre notre société actuelle, reste toujours la justice. « La justice ne peut résoudre tous les problèmes, mais sa présence est indispensable pour ramener la sérénité, la tranquillité et ou la paix sociale par la confiance qu’elle permet de restaurer. Surtout en ces moments de peur et de désespoir », a résumé Mohamed Abdrahamane Maïga.
Le représentant du Bâtonnier, Me Abdoulaye F. Sangaré, a juste salué les magistrats présents pour la circonstance, en dépit des difficultés de plusieurs ordres. Il a ensuite exhorté les hommes en robe noire d’appliquer la loi.
Seydou Diamoutene
22 Septembre