Le Président de la Commission, le Professeur Alkadri Diarra, souligne dans ce communiqué que « la protection des droits de l’Homme est une responsabilité partagée », insistant sur le fait que nul n’est à l’abri d’une violation de ses droits.
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Droits de l’homme au Mali : Développements positifs et négatifs, recommandations de la CNDH  

Déclaration présentée par le Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme du Mali à la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples lors de la 83è session ordinaire de la Commission

INTRODUCTION

La Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) est une autorité administrative indépendante créée par la Loi n°2016-036 du 7 juillet 2016 en charge de la promotion et de la protection des droits de l’homme ainsi que de la prévention de la torture. Elle est également chargée de la protection des Défenseurs des Droits Humains (DDH).

Depuis mars 2022, elle est accréditée au statut A, pour sa conformité aux Principes de Paris. Aux termes de l’article 5 de sa Loi de création, la CNDH est chargée entre autres de « … développer la coopération dans le domaine des droits de l’homme avec les Institutions de la République, les organes des Nations Unies, les institutions régionales (…), etc. ». C’est à ce titre qu’elle soumet à l’appréciation de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples la présente déclaration relative à la situation des droits de l’homme au Mali de novembre 2024 à avril 2025.Durant la période de référence, la CNDH-Mali a été renouvelée.

J’ai l’honneur et le privilège de présider cette nouvelle équipe pour les sept années à venir. Le Mali, depuis 2012, connait une crise multidimensionnelle qui impactent la vie des populations. A cela, s’ajoutent la crise politique caractérisée par la rupture constitutionnelle depuis près de cinq ans et la crise énergétique qui freine considérablement l’économie nationale. Tout cela conduit souvent à des violations des droits de l’Homme sur l’étendue du territoire malien. L’examen de la situation des droits de l’Homme de novembre 2024 à avril 2025 révèle des efforts notoires et des défis majeurs.

I. RESUME DES DEVELOPPEMENTS POSITIFS EN MATIERE DE DROITS DE L’HOMME

En termes d’efforts, l’adoption des nouveaux codes pénal et de procédure pénale le 13 décembre 2024 marque un tournant majeur dans la lutte pour la protection des droits de l’Homme. Ces textes répriment désormais plusieurs types de VBG, l’esclavage et les pratiques assimilées, la traite des personnes et trafic illicite de migrants. Il faut également relever dans ces textes, la possibilité pour la CNDH d’assister les personnes gardées à vue et les victimes ; la mise en place d’un collège des libertés et de la détention qui va désormais statuer sur le décernement du mandat et la libération des personnes privées de liberté ; la création d’une chambre criminelle au sein de chaque TGI, devant permettre de rendre la justice dans un délai raisonnable.

La nomination de nouveaux commissaires à la CNDH le 24 décembre 2024 constitue également un acquis en matière de respect des droits de l’Homme. Dans le cadre de la lutte contre l’impunité, certaines infractions commises par les militaires sur le théâtre des opérations, ont été judiciarisées. Par ailleurs, le recrutement de 118 auditeurs de justice (futurs magistrats) et 120 greffiers en justice devrait permettre l’amélioration de la qualité des services fournis par la justice.

En matière de coopération judiciaire, les efforts conjugués du Gouvernement et de la CNDH ont facilité le transfèrement de Yaya Cissé, ressortissant malien, condamné à la peine capitale en Mauritanie depuis plus d’une décennie pour un crime qu’il dit n’avoir pas commis, dans une prison malienne pour y purger sa peine.

La CNDH tient à remercier les autorités maliennes et mauritaniennes ainsi que la CNDH de la Mauritanie pour leur implication dans cette affaire. Ces efforts non négligeables ne doivent, toutefois, pas occulter les énormes défis.

Une crise dangereuse !

 

II. RESUME DES DEVELOPPEMENTS NEGATIFS EN MATIERE DE DROITS DE L’HOMME

Concernant les défis, ils sont répartis entre les droits civils et politiques, d’une part et les droits économiques, sociaux et culturels, d’autre part. En matière de droits civils et politiques, l’espace civique fait l’objet d’un rétrécissement manifeste.

Cela se caractérise par les arrestations, les enlèvements et les disparitions forcées de plusieurs acteurs politiques et Hommes de média ; l’adoption d’un projet de loi portant abrogation de la loi portant charte des partis politiques.L’esclavage continue à sévir au Mali surtout dans les Régions de Kayes, Kita, Nioro, Nara, Tombouctou, Gao et Kidal.

Si on constate une diminution des violences physiques avec la tenue des assises spéciales de 2023, les spoliations des terres prennent de l’ampleur.En matière de droits économiques, sociaux et culturels, la période de référence a surtout été marquée par la persistance de crise énergétique avec des impacts, notamment sur l’ensemble du secteur économique, y compris informel.

Les droits à la santé et à l’éducation ont également été impactés notamment dans les zones de conflit. Les personnes en situation de vulnérabilité ont connu des violations de leurs droits. Plusieurs cas de VBG ont été enregistrés durant la période de référence.

III. RECOMMANDATIONS

Face à tous ces défis, la CNDH recommande de :

– Favoriser une meilleure protection de l’espace civique à travers la promotion des libertés fondamentales ;

– Adopter une loi spécifique sur l’esclavage et les pratiques analogues ;

– Renforcer la fourniture d’électricité sur l’étendue du territoire et accompagner les petites et moyennes entreprises pour relancer l’économie ;

– Créer les conditions d’un retour sécurisé de l’administration et des services sociaux de base ;

– Adopter une loi spécifique sur les VBG.

Pour la Commission,

Le Président  

Professeur Alkadri DIARRA

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