La campagne pour la présidentielle du 29 juillet prochain est officiellement ouverte depuis hier dimanche. Sans perdre une minute, serait-on tenté d’écrire, deux des 24 candidats admis à compétir par la Cour constitutionnelle sont entrés en lice de façon spectaculaire. Il s’agit du président-candidat IBK et de son cadet et non moins rival de toujours, Soumaïla Cissé.
Le premier a choisi l’emblématique stade du 26 mars pour sa sortie inaugurale et ce n’est sans doute pas un hasard. Il a souci d’effacer le détestable souvenir des 60 à 80.000 personnes revendiquées par les partisans de son concurrent le plus redouté lors de l’investiture de ce dernier, en y drainant une foule bien plus importante.
Le second, pour sa part, a opté pour une marche qui mobiliserait un nombre impressionnant de ses adeptes et sympathisants sur le boulevard de l’indépendance. A l’image, probablement, de ” la marée des manifestants “ du 8 juin dernier.
La vigueur de l’entrée en scène des deux hommes n’est pas pour surprendre. Ils ont en commun des atouts qui les destinent à jouer un rôle majeur dans cette élection.
Ils sont tous deux de hautes figures de la politique malienne des trois dernières décennies, ce qui leur vaut une clientèle et une influence toutes spéciales.
L’un et l’autre sont adossés à des partis politiques, le RPM pour IBK, l’URD pour Soumaïla Cissé, bien implantés sur tout le territoire national.
Ils sont soutenus par des plateformes électorales comprenant plusieurs dizaines de partis politiques, des centaines d’associations de la société civile, de mouvements, de clubs, de personnalités de premier plan.
Ils possèdent enfin la logistique et les moyens financiers de leur ambition. Autant d’avantages qui leur procurent une longue d’avance sur les autres candidats.
A noter toutefois qu’IBK a subi, ces derniers temps, une décote liée à son bilan mi-figue mi-raisin, à la perte d’une large part de ses soutiens politiques et religieux. Il peut compter cependant sur une contre-partie de taille: l’appui des paysans, singulièrement les cotonculteurs que lui garantit le plus puissant d’entre eux : Bakary Togola. Le patron de l’APCAM lui a promis la victoire dès le premier tour et il ne lésinera pas sur son immense fortune pour tenir cette promesse.
A l’opposé, Soumaïla Cissé peut compter sur le concours de la jeunesse urbaine emmenée par le CDR de Ras Bath. Il a vu aussi ses rangs renforcés par le ralliement d’anciens ministres et hauts fonctionnaires, d’ex-rebelles kidalois, d’artistes de renom comme Salif Keïta et Guimba national.
Tout n’est pas perdu pour autant pour les autres candidats. Certains d’entre eux détiennent des cartes pour réaliser un bon score. Voire créer la surprise.
C’est le cas de Aliou Boubacar Diallo. Ce novice en politique (il est le promoteur de l’ADP-Maliba qui en est à sa cinquième année d’existence) a le soutien du Cherif de Nioro. Ce qui peut conforter sa position eu égard à l’influence du guide des hamallistes qui s’étend bien au-delà du Sahel occidental. Dans un environnement où la population éprouve le sentiment que les politiques ont abdiqué devant les leaders musulmans et qu’ils sont désormais à leur remorque, tout devient possible.
Cas également de Housseyni Amion Guindo. Son parti, la CODEM, a fait bien du chemin depuis sa création, il y a un peu plus de dix ans. Aux communales de 2016, il s’est arrogé 705 conseillers dont 38 maires. Il se prévaut d’une couverture territoriale de 95% à Ségou, 74% à Koulikoro, 63% à Sikasso, 50% à Gao, 38% à Tombouctou, 34% à Kayes et 18% à Mopti.
Ces derniers jours, Poulo a obtenu le ralliement de l’ex-rébellion kidaloise (CMA) à sa candidature, ce qui, outre les voix qu’il pourra lui apporter dans l’adrar des Ifoghas, est susceptible de booster son score à l’échelle nationale, le retour de la paix et de la sécurité étant le voeu le plus cher de nos concitoyens.
Modibo Sidibé fait partie des candidats jouissant d’un crédit indiscutable. Son parti, les Fare Anka Wuli, n’est peut-être pas implanté dans tout le Mali mais il a su mettre en place, lui aussi, une plateforme qui pourrait relativement compenser cette faiblesse. Il a surtout beaucoup voyagé ces derniers mois et la campagne de proximité qu’il a choisi de mener à travers villes et campagnes pourrait produire des résultats à la hauteur de ses attentes.
Autant dire que les paris sont ouverts.
Saouti Labass Haïdara
Source: L’Indépendant