Education

Notes sexuellement transmissibles : un mal qui mine l’éducation malienne

L’école malienne est devenue le plus grand centre de déformation. Elle se trouve écartelée entre les notes sexuellement transmissibles et les moyennes financièrement transmissibles.

«Ne doutez pas que les notes se vendent en nature et en espèces de nos jours entre les murs des écoles. Entre notes sexuellement Transmissibles et les notes financièrement transmissibles on s’interroge qui des élèves ou des professeurs ou encore des autorités de l’école est tombé sur la tête ? »lance Amadou Mariko, étudiant.

Dans la période contemporaine de l’indépendance, les méthodes d’enseignement étaient strictes et rigoureuses. Les parents d’élèves ne déboursaient aucun centime de leurs poches. Les élèves apprenaient sous la contrainte. «L’enseignant demeurait le maître à bord en classe», affirme Yacouba Coulibaly, vice président de la fédération nationale des parents d’élèves et d’étudiants du Mali (FENAPEEM), enseignant à la retraite.

Depuis l’instauration de la démocratie, la situation s’est considérablement inversée. On parle de pertes de valeurs généralisées entre les murs de l’école malienne. « Aujourd’hui, il n’y a plus aucune discipline ni hiérarchie dans les cours d’école. L’étudiante prend du thé avec son professeur jusqu’à devenir sa maitresse », explique Baradji Touré, surveillant d’un lycée.

Selon Oumar Koné, parent d’élève, l’école malienne est devenue le haut lieu de la corruption entretenue par un maximum de professeurs, d’élèves et de parents d’élèves. Cette pratique compromet le travail des écoles, des universités et affecte la réputation de l’ensemble du système d’enseignement malien : « c’est à nous, parents, de bien suivre nos enfants. Chaque enfant est l’image de sa famille » ajoute-t-il.

Propos que Kafounè Kouma, un autre parent d’élève ne partage pas totalement,« La corruption en milieu scolaire est maintenant une source de revenue pour ceux qui sont censés dispenser le savoir. Autrefois n’importe qui n’avait pas le privilège de donner des cours.»

Ami Diallo, élève en classe de 11ème année, estime que certains enseignants sont à l’origine de cette pratique. « Dans ma classe, il y a un groupe de filles qui ne suivent jamais certains cours mais étrangement elles ont les meilleures notes. Comment expliquer cette situation ? Indirectement nos éducateurs sont en train de nous dire que la meilleure manière d’avancer c’est de se déshabiller », s’indigne la jeune fille.

Pour Alou Coulibaly, promoteur d’école, c’est une question de rigueur : «Aucun enseignant n’est assez fou pour sortir avec une élève dans mon établissement. »

Le phénomène des NST se manifeste sous deux angles. « Dans un premier tableau, c’est l’enseignant qui s’entiche d’une gamine et qui fait pression sur elle. Cette pression se manifeste par des mauvaises notes ou des interrogations orales souvent très corsées. Le deuxième tableau c’est lorsqu’une élève qui n’a pas de niveau séduit son maitre en échange de bonne notes », nous explique Koné Adama, enseignant.

Dans les deux cas, le phénomène des NST en milieu scolaire bien qu’il soit connu de tous est un vrai tabou. Aucun enseignant lors de cette enquête n’a affirmé avoir déjà fait des propositions indécentes à une de ses élèves. Mais Alassane Diarra, enseignant reconnaît avoir reçu des propositions des élèves et affirme les avoir déclinées : C’est contraire à l’éthique et à la déontologie de la profession enseignante.

Plusieurs jeunes filles disent toujours avoir une copine ou une connaissance qui a déjà été la victime d’un enseignant. Jamais l’exemple personnel n’est évoqué à l’exception de M.S, étudiante: «Mon professeur m’a proposé entre cinquante mille ou quelques heures dans une chambre d’hôtel pour passer en classe supérieure. J’ai dit oui pour l’argent mais c’est autre chose qu’il voulait. J’ai répondu que je suis une femme mariée et il m’a répondu qu’une seule fois ne change rien.»

Mamadou Dia, chef de Département d’études et de recherche de la faculté des lettres, des langues et des sciences du langage(FLLSL) estime que la meilleure arme pour vaincre les NST est la sensibilisation des enseignants et des élèves sur les dangers du fléau. Grossesses non désirées et à risque, maladies sexuellement transmissibles et peine d’emprisonnement sont là pour décourager les plus téméraires.

Bintou Diarra

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *