L’Assemblée nationale du Mali a adopté, hier, mercredi 31 octobre 2018, le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence déclaré sur le territoire national par la majorité des députés à hauteur de 107 voix pour, zéro contre et zéro abstention. Mais en donnant leur quitus pour la prorogation de l’état d’urgence jusqu’au 31 octobre 2019, les députés ont invité le gouvernement à veiller non seulement au respect des droits des citoyens, mais à éviter les abus et dérives.
Les travaux de la séance plénière étaient présidés par le président de l’Assemblée nationale, l’honorable Issaka Sidibé, en présence du ministre de la sécurité et de la protection civile, Général Salif Traoré, des honorables députés et d’autres personnalités. Selon le président de la Commission des Lois Constitutionnelles, de la Législation, de la Justice, des Droits de l’Homme et des Institutions de la République, Me Zoumana N’Tji Doumbia, l’état d’urgence a été déclaré sur le territoire national par le Décret N°2017- 03381P-RM du 19 avril 2017 en raison notamment de la situation sécuritaire du pays et de la persistance de la menace terroriste. Il a fait l’objet de deux prorogations, dit-il, dont la dernière expire ce 31 octobre 2018.
*A ses dires, ces prorogations ont permis notamment de renforcer les mesures de prévention au niveau des autorités administratives ; de proroger les effets des poursuites judiciaires liées à l’état d’urgence ; d’accroitre les actions de contrôle, les moyens juridiques et les capacités opérationnelles des forces de sécurité sur le territoire national ; de rétablir la sécurité dans certaines localités où l’emprise des groupes armés sur les populations avait provoqué la fermeture de certains établissements scolaires et limité sensiblement la libre circulation des personnes et des biens.
Au cours des séances d’audition organisées par la Commission des Lois, Me Zoumana N’Tji Doumbia a fait savoir que le Gouvernement a estimé que l’état d’urgence est un élément essentiel dans le dispositif de lutte contre la menace terroriste. Selon lui, la loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence a permis aux autorités compétentes, entre autres, de renforcer des contrôles à l’entrée et à la sortie du territoire national par les forces de sécurité ; d’organiser des patrouilles mixtes nocturnes par les forces de sécurité ; de restreindre la délivrance des autorisations de manifestation ; de mener des perquisitions aux domiciles à l’effet de rechercher des armes à feu ; d’interpeller plusieurs personnes dont plus de la moitié déférées devant les juridictions.
Comment s’effectue l’état d’urgence à Kidal où l’Etat est absent ?
L’une des recommandations faites par la commission loi est la nécessité de mettre à la disposition des autorités administratives, judiciaires et militaires les moyens adéquats pour leur permettre d’accomplir efficacement leurs missions. Lors des débats, des préoccupations relatives à l’opérationnalisation de la Commission Consultative de contrôle de l’état d’urgence, qui est un mécanisme d’équilibre pour garantir les libertés collectives et individuelles ainsi que la préservation de l’état de droit, ont été évoquées par les députés. Le député Dédéou Traoré de l’opposition aussi bien que d’autres députés ont invité le gouvernement à faire le bilan du dernier état d’urgence.
L’honorable député de Téssalit, Aïcha Belco Maïga a voulu savoir comment s’effectue l’état d’urgence dans la région de Kidal dans la mesure où l’Etat est absent. « Je pense qu’il faut carrément dire aux maliens que l’Etat n’existe pas à Kidal. Le gouverneur a donné un ultimatum aux enseignants à aller à leur poste or lui-même n’est pas à Kidal, son staff n’est pas à Kidal », a-t-elle dit. Avant de déplorer le fait que Kidal ne bénéficie pas de certains projets compte tenu de son inaccessibilité.
L’honorable N’Doula Thiam persiste et signe que pendant les 12 derniers mois où il y a avait l’état d’urgence, il y a eu quelques abus. Quant à l’honorable Moussa Timbiné, il a insisté sur la sécurité des forces de l’ordre. Avant de mettre l’accent sur le bien fondé de l’état d’urgence au Mali. Répondant aux préoccupations des députés, le ministre de la sécurité et de la protection civile, Salif Traoré a fait savoir que lors de l’état d’urgence écoulé, il y a eu 4005 perquisitions, la saisie de 210 armes et une quantité énorme de drogue, plus de 30 000 patrouilles ont été effectuées. Il a rappelé que quelques marches ont été interdites parce qu’il y avait des opérations en cours. Le ministre a promis de tout mettre en œuvre pour préserver la sécurité et les droits des citoyens. A l’issue des débats, le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence déclaré sur le territoire national par la majorité des députés à hauteur de 107 voix pour, zéro contre, zéro abstention.
Aguibou Sogodogo
Source: Le Républicain