Fragilisé par la situation sécuritaire dans son ensemble, le Mali ne semble pas à l’abri du spectre du chaos de 2012. La manifestation de protestation, prévue le 5 juin prochain, contre le régime en place demandant la démission du Président de la République, même légitime, augmente la crainte chez bon nombre de citoyens sur son issue incertaine.
La place du monument de l’indépendance, au cœur de la capitale Bamako, est symbolique. C’est le lieu qui abrite généralement toutes les manifestations de soutien à un pouvoir ou de protestation contre un régime. Sa position stratégique, son accès facile aux quatre points cardinaux, sont des atouts indispensables aux organisateurs de manifestations dans la capitale des trois caïmans.
C’est le lieu choisi par l’imam Mahmoud Dicko et alliés pour la grande prière du vendredi 5 juin, jumelée à leur manifestation qu’ils organisent. Une première : la prière de vendredi se tient au monument de l’indépendance, loin de ces nombreuses mosquées que compte la capitale. En tout cas, c’est ce qu’affirme le leader religieux Mahmoud Dicko qualifié par certains medias de ‘’l’imam politique’’, même n’ayant pas la caution de tous les leaders religieux.
Pour l’instant, il est difficile d’imaginer la suite. Des spéculations font dire autour de la décision de l’imam, en tête de ses alliés, que le pouvoir tenterait de l’empêcher. Parce que, certains voient en cela une volonté manifeste du chef de file de la manifestation de conduire le pays vers une ISSUE désagréable.
Manifestation anti-IBK du vendredi 5 juin : Des projets putschistes à déjouer ?
Longtemps plongé dans le silence ou du moins mis en sursis ses différentes manifestations contre le pouvoir, l’imam Dicko revient au-devant de la scène avec, semble-t-il, de nouvelles stratégies et de nouveaux alliés. La marche programmée du 5 juin prochain est la première depuis celle qu’il a organisée, en avril 2019, pour faire partir le Premier ministre d’alors Soumeylou Boubeye Maiga, pour des raisons liées à la gestion de la situation sécuritaire dans le centre et la gouvernance globale du pays.
Basculer à la moindre erreur
Un an après, le constat montre que les raisons pour lesquelles l’ancien président du HCIM a combattu SBM sont plus que d’actualités. Elles ont même été aggravées. C’est ce qui fait dire à certains intellectuels que le problème, ce n’est la personne. Il est ailleurs. Jouant sur le sentiment de rejet des acteurs de la démocratie par une bonne partie du peuple, surtout les habitants de la capitale, Mahmoud Dicko entreprend une nouvelle aventure de protestation en demandant la démission du Président de la République Ibrahim Boubacar Keita. Un an plus tard, il aura obtenu la démission de son Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga.
L’idée de marcher à Bamako jusqu’à demander la démission du Président de la République, même étant un droit constitutionnel des citoyens, n’enchante pas une bonne partie de la population. Elle estime que la situation du pays est très fragile et pourrait basculer dans le chaos à la moindre erreur.
Constat : depuis l’annonce de cette marche de protestation, les internautes sur Facebook ont désapprouvé l’initiative. Ils ont également estimé que le moment n’est pas opportun et la démission du président de la République demandée n’arrange pas le pays. « Elle pourrait même aggraver la situation », estiment-ils.
Pour qui connait la situation du pays, l’organisation de la marche et la demande de démission du Président ne présagent pas du bien pour l’ensemble national, selon des observateurs de la politique.
« Si le Président de la République démissionne aujourd’hui, c’est la déstabilisation de toute la République et le retour à la case de départ. La situation sécuritaire va aggraver. Les groupes armées terroristes, s’ils le veulent, prendront même Bamako, parce qu’aucune force armée nationale ne peut s’opposer, faute de Commandement, qui est de celui de l’Etat d’abord », explique un diplomate en poste à Bamako.
Au sein de l’opinion nationale, des citoyens dotés de bon sens rejettent l’idée de la marche de protestation, même s’elle est maintenue par ses organisateurs. Alors, concluent-ils, il y a une tentative déguisée de s’emparer du pouvoir, rien que par la rue.
Habi Sankoré
Source: Le SOFT