En milieu de semaine dernière, les fidèles spectateurs du journal télévisé de l’Ortm ont pu voir l’élément sur la saisie très médiatisée de boissons par la Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence. À voir de près (sans questionnement sur les circonstances d’une telle bévue en plein centre-ville de Bamako), « bravo !», diraient les plus émus par l’aspect héroïque de la DGCC. Or, en la réalité, cette saisie n’atteste que la défaillance d’une Direction passée pour complice de la dégradation de la santé publique, de par son inaction, de la mise sur le marché des produits non autorisés à la consommation.
« La Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence engagée dans la lutte contre certaines pratiques dans nos marchés a déployé à travers le pays des équipes d’enquêtes qui viennent de signaler des faits contraires à la réglementation parmi lesquels, la détention de stocks de marchandises sans justificatifs », a égrené le présentateur du journal télévisé de 20 heures.
En substance et comme il le poursuit en détails, le confrère, beaucoup plus concentré sur le caractère alcoolique desdits produits (l’importation des boissons alcoolisées n’est pas interdite au Mali), voudrait juste nous dire, au grand plaisir de ceux qui ont commandité cette auto flagellation, pardon médiatisation, que la DGCC a réalisé un gros coup de filet à travers ses agents mis en contribution en dénichant de fortes quantités de marques de boissons dépourvues de première autorisation de consommation destinées à la consommation.
Jusqu’ici, tout roule bien pour un citoyen lambda, assis dans son salon, ne s’interrogeant pas assez sur comment ces fortes quantités de boissons incriminées ont pu être acheminées jusqu’à des entrepôts bamakois. Pour ceux qui ne feront pas l’effort à demander depuis quand et par quels chemins ces produits susceptibles de nuire à la santé des maliens, tel que le prétend le Directeur Bougadary Doumbia, sont-ils parvenus à gagner Bamako, la DGCC a fait un grand boulot. Une erreur d’analyse pourtant.
Disons-le sans état d’âme, la DGCC, en voulant se targuer d’un acte héroïque par la saisie des quantités de boissons dont une bonne partie est déjà consommée, fait un honteux et impardonnable aveu d’inapplication. Autrement dit, ces agents de la DGCC qui se bombent la poitrine pour avoir découvert des entrepôts remplis de centaines de tonnes de boissons alcoolisées sans autorisation, ont-ils passé tout ce temps à dormir sans avoir aperçu aucune seule canette dans les maquis, les supermarchés et les alimentations qu’ils sont autorisés à contrôler ? Pendant qu’ils dormaient, combien de consommateurs maliens ont dû ingurgiter ces boissons ? Et qui en est responsable ? A entendre le Directeur Bougadary Doumbia devant le petit écran, étalant sa faute morale qu’il veut transformer en succès, il n’y a pas de fautifs. La DGCC qui a mis les magasins sous scellés se limitera à faire payer juste une pénalité aux contrevenants et à faire soumettre les produits à un laboratoire pour étudier leur état, pour ensuite le détruire s’ils nuisent à la santé. Trop facile !
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Bizarrement, le Directeur Doumbia fait des aveux sans s’en rendre compte : « la préservation de la santé et du droit du consommateur constituent une des missions de la DGCC». C’est là où le bât blesse. Qu’en est-il de ceux dont la santé serait mise en danger ? Sinon, qu’a fait la DGCC dont on connait maintenant l’une des missions pour ces consommateurs maliens qui ont déjà pris des doses ? La DGCC n’en a cure certainement !
Par ailleurs, s’il faut une autorisation après des analyses au laboratoire, sur quelle base le consommateur malien pourra reconnaître le produit qu’il peut être amené à consommer sans courir de risque sanitaire ? La DGCC est-elle en train de nous dire que tous les produits sur le marché de la consommation au Mali, tel que cela est prévu par la loi, ont-ils des autorisations de première consommation, à part les boissons que ses agents viennent de saisir ?
Selon l’article 6 du décret N°06-259/P-RM du 23 juin 2006, instituant l’autorisation de mise sur le marché de la consommation, ‘’sont soumis à l’autorisation de mise sur le marché, les denrées alimentaires produites au Mali, les denrées alimentaires importées, les aliments pour animaux, les additifs alimentaires’’. Ce qui englobe toute substance totalement traitée, partiellement traitée, ou brute, destinée à l’alimentation humaine et englobant les boissons, le « chewing-gum » et toutes les substances utilisées dans la fabrication, la préparation et le traitement des aliments. Donc, ce ne sont pas que les boissons incriminées par le DG de la DGCC qui souffrent d’autorisation. Le marché de la consommation est envahi par toutes sortes de denrées et dont l’origine reste méconnue. Mais qui en est responsable ?
Gageons qu’au-delà du buzz qu’elle a créé, la DGCC qui n’a non seulement aucun contrôle réel sur le marché de la consommation au Mali, n’a tenté que de se faire de la place au soleil. Sûrement parce que les murmures qui circulent font croire que l’actuel Directeur Bougadary Doumbia ne fait plus l’affaire des autorités de la transition qui le soupçonnent d’être passif. Une manière donc pour lui de s’adonner à étaler les vieilles pratiques qu’il savait existantes et dont il n’a plus le contrôle. Rien de nouveau sous le soleil : pour qui voit juste, la DGCC apparaît complice d’une d’entreprise d’empoissonnement de Maliens livrés à consommer des produits sur leurs marchés sans avis de laboratoire ni autorisation.
Mis à part cet état de fait, il faut noter que l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché au Mali suit toute une chaîne, générant des gains non négligeables pour le compte de l’Etat. Que donc, durant toutes ces années, c’est maintenant que Monsieur Bougadary qui devrait se remettre en cause nous brandit le mal qu’il aurait entretenu comme trophée de guerre ?
Selon nos informations, au Mali une autorisation est délivrée à chaque produit pour une durée de 5 ans. Sur chaque produit, une part de 250.000 FCFA va directement au trésor public. Cependant, ils sont des milliers voire de millions de produits de consommation dépourvus d’autorisation par le fait de la léthargie de la DGCC qui laisse le marché à la merci de qui le veut. Ce manquement grave de la DGCC ouvrant la voie aux contrevenants, prive les laboratoires d’activités car le marché n’est pas contrôlé. Quel gâchis ?
Nous y reviendrons…
I.T
Le Soft