Dans cet article qu’il a bien voulu mettre à notre disposition, le professeur Abdrahamane SANOGO, ex Doyen de la Faculté Des Sciences Economiques et de Gestion, dresse un tableau très peu luisant du secteur bancaire malien en faisant un focus sur l’un de ses établissements. Lisez !
Est-ce admissible dans un Etat de droit pour une personne -physique ou morale- de nuire volontairement à d’autres, sans rendre compte et sans que les victimes ne puissent l’interroger? Pourtant, c’est ce qui se passe dans une des 14 banques primaires du Mali. Il s’agit en l’occurrence de la Banque dénommée ECOBANK qui, à la date d’aujourd’hui 05 août 2019, a été incapable de payer les intérêts de 3,5% sur les comptes d’épargne des épargnants, en flagrante violation des textes de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), alors que toutes les banques primaires de la place l’ont déjà fait entre le 1er et le 03 juillet. Lesdits intérêts courent normalement du 1er janvier au 30 juin 2019, étant entendu que leur calcul et leur paiement est semestriel. C’est à peu près entre 6000 et 8000 épargnants maliens qui sont sevrés de leurs dus, sans explication aucune. Autour de cette affaire mafieuse, il n’y a aucune transparence, car dans chaque agence Ecobank de Bamako, c’est la même chanson chez les responsables: “nous ne connaissons malheureusement pas trop sur les raisons. C’est peut-être une défaillance technique”. Peut-on être incapable dans le cas d’espèce d’informer ses clients, dans la mesure où c’est de la gestion de leur argent dont il est question. Où est la transparence dans cette affaire? Le client doit il se taire et regarder faire? Beaucoup d’épargnants rencontrés dans les différentes agences, désemparés, se préparent à fermer leurs comptes dans cette structure et à déposer leur épargne dans une autre banque plus crédible. Donc la concurrence est ouverte, puisque ces banques primaires sont en situation d’oligopole.
Même si la situation venait à être régularisée (dans quel délai?), est ce que les clients seront-ils dédommagés, puisque Ecobank aura causé des préjudices à des milliers de ses clients? Par ailleurs, est ce que les épargnants qui ne touchent pas d’habitude à leurs intérêts, préférant les capitaliser bénéficieront à la nouvelle échéance du 31 Décembre 2019 d’un intérêt sur ce nouveau capital? On ne le croit pas, car l’arnaque semble être savamment organisée. Oh! Quel dommage que la finance crée à ses usagers.
Aussi cette banque toujours dans l’opacité, se permet de prélever mensuellement des frais de cartes informatiques sur les comptes des épargnants, alors que ceux-ci n’en disposent pas. Seuls les titulaires de comptes courants et qui en ont fait la demande doivent payer des frais pour la détention et l’usage desdites cartes. Tout cela est-il admissible de la part d’une banque primaire à caractère international ? Le caractère abusif du comportement d’ECOBANK est manifeste et doit être porté à la connaissance de tous les citoyens.
Jusqu’à quand cette banque va garder le silence sur cette affaire ténébreuse, alors qu’entre temps les centaines de millions de francs d’intérêts des épargnants se trouvent être placés sur le marché monétaire, pour générer encore des intérêts pour le seul compte d’ECOBANK. Quel dommage ! Notre but n’est pas de nuire à ECOBANK, mais d’éclairer l’opinion publique. C’est cela aussi une exigence de la démocratie.
Pr Abdrahamane SANOGO, Ex Doyen de la Faculté
Ecobank-Mali Des Sciences Economiques et de Gestion, FSEG
Inf@Sept