Le Mali n’est plus un pays béni-oui-oui vis-à-vis de ses partenaires. Du moins en cette période de transition. Les autorités de la Transition semblent rompre avec ce comportement, conscient du « prix à payer ». Le ministre Abdoulaye Diop a été clair devant les partenaires du Groupe de Soutien à la Transition au Mali, « notre Gouvernement est désormais prêt à dire non quand nous estimons que l’aide, l’assistance ou le partenariat qui nous sont proposés ne sont pas en ligne avec notre propre vision du Mali ».
Le mardi 6 septembre dernier se sont tenus dans la capitale togolaise les travaux de la 3ème réunion du Groupe de Suivi et de Soutien à la Transition au Mali (GST – MALI), sous la présidence du Ministre togolais des Affaires étrangères, de l’Intégration régionale et des togolais de l’Etranger, Pr. Robert Dussey, représentant le Président Faure Essozinma Gnassingbé. Au-delà de la forte délégation malienne ministérielle conduite par le ministre Abdoulaye Diop des affaires étrangères et de la Coopération internationale, on notait la participation de plusieurs autres personnalités dont les Commissaires aux Affaires politiques, à la Paix et à la Sécurité de l’Union africaine, et de la CEDEAO, respectivement les Ambassadeurs Bankole Adeoye et Dr Abdel Fatau MUSAH, le Chef de la MINUSMA, M. Elghassim Wane et le représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest, M. Saleh Annadif.
Des progrès constatés
Toutes ces personnalités ont constaté et salué les progrès réalisés par les autorités de la Transition pour un retour à l’ordre constitutionnel. Il s’agit notamment de l’adoption d’une nouvelle charte de la transition, le calendrier détaillé des réformes et des élections et surtout l’adoption d’une nouvelle loi électorale et la nomination des membres du comité chargé de la rédaction de la nouvelle constitution, l’adoption de la stratégie de stabilisation des régions du Centre du Mali. « Ces efforts déterminants des autorités maliennes doivent être encouragés sans réserve », a souhaité Pr Robert Dussey, Chef de la diplomatie malienne.
Aussi bien pour le Représentant de l’UA que pour le Commissaire aux Affaires politiques, à la Paix et à la Sécurité de la CEDEAO, Dr Abdel Fatau MUSAH, le soutien de ces institutions au processus de la transition du Mali doit être renforcé. D’où leurs appels respectifs aux partenaires bi et multilatéraux à se mobiliser autour du Mali pour le rétablissement de la paix, la stabilité et la sécurité en vue d’amorcer un développement durable. Même son de cloche chez le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, Chef de la MINUMA. Elghassim Wane s’est non seulement félicité du respect des engagements des autorités maliennes par la tenue de haut niveau du CSA, il a estimé que cette réunion du GST-Mali ‘’devrait marquer de façon plus pragmatique le soutien au Mali par des actions pour la stabilisation’’. Ainsi a-t-il souligné la nécessité de la mobilisation et réitéré de « l’accompagnement sans faille des partenaires » face aux défis complexes et immenses sur les plans sécuritaire, humanitaire et socio-économique.
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Le Chef de la Délégation malienne, Abdoulaye Diop, Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, s’est réjoui de la mobilisation des partenaires, qui, selon lui, « démontre une fois de plus l’engagement, la détermination et la solidarité agissante de la communauté africaine et internationale à accompagner et à soutenir davantage le Mali pour une stabilité durable ».
Mais, le ministre Diop a bien signifié que dans le cadre de cette mobilisation, mutualisation et coordination des efforts, le Mali sait pouvoir compter sur l’alignement de ses partenaires sur les 3 principes clés qui guident l’action publique au Mali, conformément à la vision de Son Excellence le Colonel Assimi GOITA, Président de la Transition. Ces principes sont « le respect de la souveraineté du Mali, le respect des choix stratégiques et le choix des partenaires opérés par le Mali et la défense des intérêts vitaux du Peuple malien dans les décisions prises ». « Avec ces principes clés à l’esprit, naturellement, le Mali reste ouvert à ses voisins, le Mali reste ouvert au monde, le Mali reste ouvert aux partenaires et à tous les partenariats. Le Mali poursuit la tradition d’un engagement panafricain pour la promotion et la défense de l’intégration et de la coopération régionales », a souligné le Chef de la diplomatie malienne.
Au Commissaire, le ministre Abdoulaye Diop a fait que le Mali réaffirme son adhésion et sa contribution permanente à tous les mécanismes de sécurité collective pertinents, mais ceux « réellement africains, dans lesquels le leadership africain est affirmé, qui promeuvent et soutiennent les solutions africaines aux problèmes africains ». « Tant que ces lignes directrices sont opérées, il n’y a pas de raison que le Mali ne continue pas à participer et même à jouer un rôle de leadership dans l’ensemble de ces organisations », a-t-il fait savoir.
Sans détours, le Chef de la diplomatie malienne a mis l’accent sur quelques éléments clés qu’il faut retenir par rapport à son pays, à savoir des principes importants qui ont souvent conduit à des tensions avec des voisins et avec des partenaires. « Le premier principe est de comprendre que personne n’aime le Mali plus que les Maliens, personne ne connaît les problèmes du Mali mieux que les Maliens et personne n’a une meilleure solution aux problèmes du Mali que les maliens eux-mêmes », a rappelé le ministre Diop. Pour lui, cela ne veut pas dire que les maliens sont arrogants, plutôt cela veut simplement signifier que ceux qui viennent aider le Mali « doivent prendre le temps » de parler avec les autorités, de les comprendre, et d’identifier la meilleure manière de pouvoir contribuer à une solution.
Poursuivant, le ministre Diop a souligné la nécessité de garder à l’esprit « que tout ce qui se fera au Mali doit se faire avec les Maliens, en accord avec les Maliens et avec la contribution des Maliens ». « Nous n’accepterons rien qui puisse se faire sans les Maliens ou contre les Maliens. Ceci est une donnée importante qu’il faut retenir », a-t-il martelé.
Rapport avec les partenaires
Le Chef de la délégation malienne a bien signifié aux partenaires que le Mali nouveau n’acceptera pas qu’on puisse lui « imposer des agendas », son « propre agenda », ses « priorités » ou « des diktats ». Tout en reconnaissant que cette nouvelle dynamique s’accompagne naturellement « d’un prix à paye », le ministre Diop a asséné : « Notre Gouvernement est désormais prêt à dire non quand nous estimons que l’aide, l’assistance ou le partenariat qui nous sont proposés ne sont pas en ligne avec notre propre vision du Mali ».
Et Abdoulaye Diop d’ajouter longuement : « Il est important de comprendre cela car pendant longtemps, nous avons remarqué que le Mali accompagnait les partenaires. Maintenant nous voulons que le logiciel change pour que les partenaires comprennent que c’est le Mali qui assurera le lead, avec le prix que cela nécessitera de payer. Ceux qui veulent travailler dans le cadre de cette vision et de ces principes sont les bienvenus. Nous voulons travailler avec les partenaires, nous voulons travailler avec tous nos partenaires, de l’ouest, de l’est, du nord et du sud. Nous le ferons dans le cadre d’avantages comparatifs que nous pourrons tirer de ces partenariats. Il faut aussi comprendre que, soutenir le Mali, travailler avec le Mali n’est pas un cadeau fait au Mali et aux maliens ; les Maliens ont la responsabilité première. »
Ces précisions, le ministre Diop les juge incontournables pour démasquer certaines entités qui veulent coller aux autorités de la transition des stéréotypes alléguant que « le Mali veut se fermer », « le Mali est isolé », « le Mali ne veut pas travailler avec les gens ». « Ce n’est pas le cas, les choses ont changé et c’est une nouvelle vision », a insisté le ministre.
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et le banditisme transfrontalier, il est quasi impossible de parler de la stabilité en Afrique de l’ouest, « tant qu’il n’y aura pas la paix et la stabilité au Mali qui occupe une position stratégique, centrale. « Lorsque quelque chose de bien se passe au Mali, cela se propage dans la région et lorsque quelque chose de mauvais se passe au Mali, cela affectera la région. Le Mali est une mosaïque de populations : toute l’Afrique de l’Ouest est au Mali tout comme le Mali est dans toute l’Afrique de l’Ouest », a averti le ministre des Affaires étrangères maliennes.
Pour terminer, le ministre Diop fait comprendre aux uns et autres que travailler avec le Mali, aider à ramener la démocratie, la paix et la stabilité au Mali est un investissement que chacun des partenaires fera pour la paix au Mali, pour la stabilité de la région et aussi pour la prospérité du monde.
Cyril Adohoun
L’Observatoire