La rumeur enfle sur une supposée volonté des autorités de dissoudre les partis politiques. Je ne suis pas militant d’un parti mais je ne crois pas judicieux de dissoudre les partis ni même d’en limiter le nombre. Pour les raisons suivantes :
– Le multipartisme est un acquis démocratique arraché au prix du sang en 1991; il est consacré par la Constitution qui interdit de le remettre en cause, même au moyen d’une révision constitutionnelle : il convient de respecter ce minimum démocratique ;
– On ne peut décider de dissoudre les partis sur la base d’assises ou de « dialogues » animés par des personnalités non élues, qui ne représentent donc pas le peuple ;
– Nul ne peut définir une base logique permettant de dissoudre un parti et d’en épargner un autre car le petit parti d’aujourd’hui est appelé à devenir le grand parti de demain en cas de rejet, par le peuple, de la politique des gouvernants ;
– Certes, les anciens dirigeants politiques sont critiquables dans leur gestion du pays, mais il s’agit là de fautes personnelles et non d’une faute générale des partis ; d’ailleurs, de 1991 à nos jours, les principaux postes gouvernementaux (Primature, ministères des Finances, de l’Administration, des Affaires étrangères ou de la Justice, par exemple) ont le plus souvent été confiés à des non-partisans ;
– La Charte des partis prévoit expressément les cas où un parti ou une association peut être dissous et aucun parti n’échappe à ces règles légales ;
– Enfin, dissoudre les partis à la veille d’élections générales conduirait à un immense désordre et apparaîtrait comme une manière de museler le peuple.
Au lieu d’une dissolution ou d’une limitation arbitraire des partis, il est préférable de prendre les mesures suivantes :
– Arrêter tout financement public des partis en raison de l’indigence de l’Etat ;
– Élargir la possibilité de dissolution aux partis qui se rendraient coupables de fraudes électorales ou financières ;
– Interdire les alliances électorales contre nature entre partis de la majorité et de l’opposition et ce, afin de sauvegarder l’image et la crédibilité des partis ;
– Obliger, sous de sévères sanctions financières, les partis à tenir régulièrement leurs assises statutaires et à ne pas recourir à des sponsors étrangers.
Maître Cheick Oumar Konaré