Dans une correspondance adressée à la directrice des finances et du matériel du ministère de la Justice et les directeurs du budget, le ministre Boubou Cissé ordonne l’émission d’ordre de recettes sur les salaires des magistrats pour fait de grève. Les juges sont vent debout.
Suite à la grève de sept jours ouvrables, du 25 juillet au 2 août, et celle illimitée décrétée depuis le 3 août par les magistrats, le ministre des Finances a sollicité de bien vouloir prendre les dispositions nécessaires et diligentes en vue de l’établissement des ordres de recettes sur les salaires de septembre des magistrats grévistes des ressorts conformément à la liste en annexe. Boubou souhaite la bonne collaboration de la directrice des finances et du matériel, les directeurs régionaux du budget et du district de Bamako.
La colère noire des magistrats…
Cette correspondance du ministre a suscité un débat au Syndicat autonome de la magistrature (Sam) et au Syndicat libre de la magistrature (Sylima). Les comités exécutifs, réunis lundi 24 septembre au siège du Sam, ont fait savoir leur désapprobation.
Prenant acte de la décision du gouvernement de procéder à la retenue sur les salaires des magistrats à partir du mois de septembre 2018, les magistrats rappellent que cette mesure est, en principe, le pendant légal de la grève à la disposition de l’employeur.
“Toutefois, en vertu de l’obligation légale incombant aux différentes parties un accord de s’exécuter de bonne foi de leurs engagements, la présente grève n’est que la réaction légale et légitime de la magistrature contre le reniement du gouvernement, si bien que toute forme de pression du pouvoir exécutif contre le pouvoir judiciaire est illégale et donnerait lieu à une réaction juridique appropriée”, indique un communiqué du Sam et du Sylima.
Ils déplorent la décision prise et assumée par le gouvernement de recourir à un tel moyen et invitent ses membres à en assumer toutes les conséquences. “L’Etat fonctionne sur la base de la complémentarité nécessaire entre les trois pouvoirs et que toute velléité paternaliste de l’un à l’encontre des autres ne peut que détériorer inopportunément l’indispensable collaboration devant présider à la conduite de l’action publique. Ceux qui prônent l’exemplarité doivent être les premiers à l’abri de tout reproche, exigent que toute la lumière soit faite autour des 3,5 milliards de F CFA évaporés curieusement dans la nature à l’hôtel des finances à l’occasion du soi-disant dédommagement d’un opérateur économique consécutivement à la crise au nord du pays.
Ladite opération, intervenue dans le cadre d’un marchandage de gré à gré entre le ministre des Finances et l’opérateur économique en question, est intervenue en violation des règles élémentaires applicables en la matière ; notent que cette importante somme d’argent a été détournée au profit d’une seule entreprise de la place et dans des conditions scabreuses, alors que l’incidence financière totale de la demande légitime des syndicats, est seulement de l’ordre de 2 milliards F CFA par an pour près de six cent magistrats : que partant, nul ne peut nous opposer une quelconque insoutenabilité budgétaire de la revalorisation demandée…”
Les syndicats de la magistrature encouragent le gouvernement á poursuivre cette campagne de provocation, tout en se réservant le droit de faire d’autres révélations et même d’entreprendre des actions plus fortes visant le même ministre, voire d’autres membres du gouvernement de la République, impliqués dans d’autres scandales non moins sulfureux.
Bréhima Sogoba
Source: L’Indicateur du Renouveau