Le Président de la République a pris part le 26 septembre 2018 à New York, au siège de l’Organisation des Nations unies, en marge de la 73ème session de l’Assemblée générale, à la réunion de haut niveau sur le Mali et le Sahel où il a prononcé un discours rassembleur (voir ci-dessous).
La cérémonie d’ouverture de cette réunion était co-présidée par le Secrétaire Général des Nations Unies, le Président du Mali, les Ministres des Affaires Étrangères du Niger, de l’Algérie et de la France, les Présidents des Commissions de l’Union Africaine et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), et la Haute Représentante de l’Union Européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité. Elle sera sanctionnée par une déclaration politique.
Au cours de la réunion, l’ONU, l’UA et l’UE ont chacune appelé la communauté internationale à agir ensemble pour aider le Mali dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.
Allocution de S.E.M. Ibrahim Boubacar Keïta, Président de la République à la Réunion de haut niveau sur le Mali et le Sahel
New York, 26 septembre 2018
Mesdames, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Monsieur le Président, Cher frère Mahamadou Issoufou,
Monsieur le Secrétaire général, Cher ami António Guterres,
Très Chers amis et partenaires du Mali et du Sahel,
Mesdames, Messieurs,
C’est toujours avec le même intérêt que je participe à cette réunion consacrée à la situation au Mali et au le Sahel. Cette rencontre qui tend à devenir une véritable tradition vise non seulement à informer la communauté internationale sur l’évolution de la situation politique et sécuritaire mais également, de sensibiliser sur les difficultés et les défis auxquels font face les pays du Sahel en général et le Mali en particulier.
Je voudrais me réjouir de votre présence et vous remercier pour votre considération, preuve si besoin en était de la solidarité agissante des Nations que vous représentez envers les peuples du Mali et du Sahel.
Je voudrais également, avant de poursuivre, rendre un vibrant hommage à toutes les victimes, civiles comme militaires, maliennes comme étrangères, de la crise malienne.
Aussi, voudrais-je exprimer ma gratitude ainsi que celle du peuple malien, au Secrétaire général et à l’ensemble du personnel des Nations Unies, pour leur engagement et leur détermination en faveur de la résolution durable de la crise malienne.
Monsieur le Secrétaire Général, je tiens à vous signifier la haute appréciation des maliens de la visite que vous avez bien voulu effectuer dans notre pays, en mai 2018.
Elle a été heureuse, car ayant permis de renforcer la confiance entre les parties maliennes et de déclencher une nouvelle dynamique pour faire avancer le processus de paix.
Dans le même esprit, la délégation du Mali, ici présente dans cette salle, comprend les représentants des mouvements signataires de l’Accord pour la paix ce qui traduit, incontestablement, la volonté des parties signataires de cheminer désormais ensemble vers une paix durable.
Monsieur le Secrétaire général,
Chers amis et partenaires du Mali et du Sahel,
Malgré les nombreux défis auxquels fait face mon pays depuis 2012, nous sommes parvenus, avec l’accompagnement des partenaires, notamment la MINUSMA, à organiser des élections inclusives, jugées transparentes par tous les observateurs nationaux et internationaux, sur l’ensemble du territoire et dans les délais constitutionnels.
Au sortir de cette échéance électorale, où les Maliennes et les Maliens m’ont renouvelé leur confiance, j’ai immédiatement donné instruction au nouveau gouvernement de travailler à la restauration de la confiance entre l’Etat et les citoyens et d’accélérer la mise en œuvre inclusive de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.
Mon propos sera ici de vous informer des progrès réalisés, des défis que nous rencontrons et des perspectives qui s’offrent à nous.
Au nombre des avancées tangibles réalisées par les parties maliennes, il me plait de souligner l’absence de belligérance et d’affrontements entre les forces armées maliennes et les mouvements armés et ce, depuis la signature de l’Accord, en mai et juin 2015.
Au titre des réformes politiques et institutionnelles, nous avons réussi la mise en place des autorités intérimaires dans les régions où elles étaient attendues, et la mise à disposition d’un financement de 8 milliards de F CFA, soit environs 15 millions de dollars américains, pour les dotations d’investissements et d’appuis techniques.
Aujourd’hui, les nouvelles régions de Ménaka et de Taoudéni sont pleinement opérationnelles et de nouvelles collectivités territoriales ont été créées. Nous avons aussi réussi à faire adopter la nouvelle loi sur les collectivités territoriales et la décentralisation.
Malgré certaines réticences, nous sommes déterminés à réviser la loi fondamentale du Mali, afin de prendre en compte certaines dispositions pertinentes de l’Accord.
Sur le plan sécuritaire, je me réjouis du lancement des opérations du Mécanisme opérationnel de Coordination à Kidal, Tombouctou et Gao.
Concomitamment, le processus de DDR se poursuit et la campagne de pré-enregistrement des combattants est en cours. La Réforme du secteur de la sécurité a effectivement démarré.
Par ailleurs, je tiens à saluer ici la participation des mouvements signataires au processus électoral, y compris par leur contribution de qualité aux efforts de sécurisation des différents scrutins. En particulier à Tombouctou et Kidal.
Je sais que ces acquis sont fragiles. J’ai également conscience de votre impatience, voire de votre frustration face à ce que vous considérez comme des lenteurs dans la mise en œuvre de l’Accord.
Cependant, nous ne devons perdre de vue les défis immenses, complexes et interdépendants qui jalonnent le processus de stabilisation, non seulement au Mali mais aussi dans la région du Sahel.
L’Etat du Mali dispose de ressources modestes, qui ne peuvent pas lui permettre de mettre en œuvre tous les engagements souscrits dans cet Accord dans les délais prescrits. C’est pourquoi, je réitère mon appel en faveur de la mobilisation effective et rapide des ressources promises par nos partenaires, en vue de nous aider à réaliser, dans les délais requis, tous les engagements contenus dans la Feuille de route du 22 mars 2018.
Dans le même registre, je dois souligner que la mise en œuvre de l’Accord implique la participation active de tous les acteurs politiques du pays, des mouvements signataires et de l’ensemble des forces vives de la nation, y compris la société civile. A cette fin, j’invite à l’union sacrée autour des voies et moyens de sortir durablement notre pays des crises cycliques. Plus que jamais, au sortir de l’élection présidentielle, je demeure dans ma posture de rassembleur de notre nation.
Monsieur le Secrétaire général,
Chers amis et partenaires du Mali et du Sahel,
Nous estimons que la lutte contre le terrorisme au Sahel est une contribution à la sécurité internationale. C’est pourquoi, nous continuons à demander au Conseil de sécurité d’autoriser le déploiement de cette force sous le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Nous invitons également nos partenaires bilatéraux et multilatéraux, qui ont fait des annonces de contributions financières, en février 2018, lors de la Conférence de Bruxelles, à honorer leurs engagements en faveur de la Force conjointe du G5 Sahel.
Cependant, nous savons tous que le tout sécuritaire a ses limites, en particulier dans le contexte où la jeunesse sahélienne est majoritairement frappée par le chômage. C’est la raison pour laquelle, concomitamment à la réponse sécuritaire, le G5 Sahel s’attèle à la mise en œuvre de son Programme d’Investissements Prioritaires (PIP), afin de relever les défis du développement, qui sont les causes profondes de l’instabilité dans notre espace commun et de la migration sauvage en particulier.
A cet égard, je salue l’Alliance pour le Sahel, qui vise à fédérer et à coordonner l’engagement de nos partenaires dans les six domaines d’actions prioritaires, à savoir :
– l’emploi des jeunes ;
– le développement rural et la sécurité alimentaire ;
– l’énergie et le climat ;
– la gouvernance et la décentralisation ;
– l’accès aux services sociaux de base et ;
– la sécurité, pour un coût financier de 6 milliards d’euros sur la période 2018-2022.
J’en appelle à la réalisation rapide de ces projets, pour créer les conditions d’une paix et d’une croissance durables au Sahel.
Dans la même veine, j’accueille favorablement le Plan de soutien des Nations Unies au Sahel et je me félicite de la nomination du Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sahel.
En termes de perspectives, je reste déterminé à poursuivre et à intensifier la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, la seule alternative pour notre pays de renouer avec la paix et la stabilité.
Les parties maliennes renouvellent leur détermination à honorer les engagements souscrits dans la Feuille de route du 22 mars 2018.
Je vais continuer à œuvrer pour la fourniture des dividendes de la paix à nos populations affectées par la crise, y compris nos réfugiés et nos déplacés internes. Je remercie au passage les pays voisins frères, pour leur générosité et leur hospitalité envers nos compatriotes.
En ce qui concerne la situation dans les régions du Centre du Mali, j’ai demandé au Gouvernement de poursuivre et d’intensifier la mise en œuvre du Plan de sécurisation intégré de ces régions qui vise, entre autres, à assurer la présence et l’opérationnalité de l’administration publique à tous les niveaux.
Pour terminer, je tiens à dire que malgré les défis de tous ordres auxquels le Mali et le Sahel sont confrontés, je reste déterminé à jouer ma partition, aux côtés de mes Pairs de la région, en vue de consolider la paix à l’intérieur des frontières du Mali, la stabilité et de développement au Sahel.
Pour ce faire, mes chers amis et partenaires du Mali et du Sahel, nous avons besoin de votre soutien.
Je vous remercie de votre attention.
Ibrahim Boubacar KEITA-/
Source: La Présidence