Politique

Le Mali dans l’impasse : Me Kanté appelle à la mobilisation des forces vives et la tenue d’un débat national

Le 15 octobre dernier, le Gouvernement du Mali, représenté par le ministre de la Cohésion sociale, de la Paix et de la Réconciliation nationale, et les Nations-Unies,  représentées par le représentant spécial du Secrétaire Général des Nations Unies au Mali, ont signé le « Pacte pour la paix  au Mali », suivant les termes de la résolution 2423 paragraphe 5 du Conseil de sécurité, adoptée le 28 juin 2018.

Aux termes d’une déclaration d’adhésion au Pacte, la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014  d’Alger et de la Coordination des mouvements de l’Azawad ont également signé en annexe.

L’objet du « Pacte pour la paix au Mali » vise l’accélération de la mise en œuvre intégrale et inclusive de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali,  issu du processus d’Alger. Face à l’absence de progrès tangibles trois ans après la signature de l’Accord, le Pacte pour la paix au Mali est adopté et il constitue désormais le canevas de référence de la mise  en œuvre dudit Accord.

Il est exigé dans le pacte du Gouvernement malien,  des Nations Unies la mise en œuvre rapide des engagements pris dans l’Accord issu du processus d’Alger relatif aux questions politiques et institutionnelles,  à la défense et à la sécurité, au développement socio-économique et culturel aussi qu’à la réconciliation, à la Justice et aux questions humanitaires et ce, conformément aux termes de la résolution, 2423 ( 2018). Le pacte pour la Paix au Mali » signé par le Gouvernement du Mali et les Nation Unies indique bien «qu’en cas de divergence dans la mise en œuvre de l’Accord,  les décisions et les arbitrages de la médiation internationale auront  un caractère exécutoire en vue d’accélérer la mise en œuvre dudit Accord, conformément à l’article 52 ».  Cet article  52 de l’Accord note que « la Médiation, sous l’égide de l’Algérie en tant que chef de file, est le garant politique de l’Accord et du respect de ses dispositions.  A ce titre, elle continue d’offrir ses bons offices aux Parties, conseille les Parties en tant que de besoin, dans le processus de mise en œuvre et joue le rôle de dernier recours au double plan politique et moral en cas de graves difficultés de nature à compromettre les objectifs et buts du présent Accord».

Le Pacte pour la paix rappelle encore aux parties engagées dans l’Accord qu’ «au regard des engagements pris dans le cadre de ce Pacte, l’Observateur  indépendant formulera les recommandations qu’il jugera pertinentes et le comité de sanction du Conseil de sécurité prendra toute action considérée comme nécessaire pour supprimer les entraves à la mise en œuvre de cet Accord, en particulier celles en lien avec l’article 29 ».

Soumis à ce diktat onusien qui vient de mettre en lumière la confiscation de notre souveraineté nationale,  le Gouvernement du Mali, paniqué, a vite procédé au morcellement du territoire sous l’appellation ‘’découpage administratif’’  et  tente aussi de renvoyer aux calendes grecques les élections législatives par voie législative.

Le découpage territorial est fortement contesté,  particulièrement au Nord – Mali, et les populations s’organisent de plus en plus par voie d’associations faîtières pour lui livrer le combat ultime.

Le report  des législatives est une violation grave  de notre constitution qui dispose que «les députés sont élus pour cinq ans au suffrage universel direct.  Une Loi fixe les modalités de cette élection».

Les délais constitutionnels étant dûment déterminés dans la constitution, les  députés ne peuvent, dès lors, siéger en Droit et se maintenir représentants du peuple. Comme l’a souligné le professeur Philippe Ardant : «les règles d’organisation et les procédures de fonctionnement des institutions forment en quelque sorte le noyau  dur de la constitution, ces dispositions concernent par exemple la désignation du chef de l’Etat, l’élection des députes, la création d’une cour chargée de veiller au respect de la constitution, les relations  entre les chambres, la révision de la constitution, la caractéristique importante de ces règles est qu’elles sont en principe obligatoires pour les pouvoir publics».

Une loi organique ne peut pas modifier la norme constitutionnelle. La constitution a clairement fixé les mandats des députés à cinq ans, une loi organique ne peut pas en droit proroger ces délais dument indiqués. La conséquence de l’inobservation d’une  telle indication de la constitution, c’est la nullité des actes posés par ces «sortes de représentants» le législateur lui-même est soumis au droit constitutionnel dans sa fonction législative.

La solution qui vaille aujourd’hui en droit et en fait, c’est la mise en œuvre efficace de la fonction présidentielle. Il faut que le Président de la République prenne  ses responsabilités devant l’histoire.

Le pays s’enfonce  en profondeur dans des situations graves, c’est au  Président de la République, à lui seul ; de trouver les hommes et les femmes qu’il faut pour mettre vite et efficacement en œuvre des solutions qu’il initie dans le respect de la dignité des Maliens.

La prorogation des mandats des députés n’est pas une solution, au contraire, au-delà qu’elle viole la volonté du peuple ; elle aggrave la crise financière que notre pays connait.  Comme le disait Achérif  Ag Ismaguel dans l’hebdomadaire Journal du Mali, n°186  du 1er au 07 novembre 2018, je cite: « Suspicions depuis octobre, certains signes laissant croire à des difficultés financières de l’Etat apparaissent.  Dans une lettre en date du 08 octobre, le Secrétaire Général de la Présidence notifiait au personnel de l’institution la suspension de la dotation hebdomadaire en carburant, ajoutant que la Situation  reviendrait à la normale sitôt que les contingences financières seront améliorées ». Ce serait un acte de haute trahison en entérinant une telle violation constitutionnelle.  C’est aussi regrettable qu’un tel Accord pour la Paix et la Réconciliation, d’une telle envergure ait été signé en dehors des règles constitutionnelles ce qui explique surtout toutes les difficultés vécues dans sa mise en œuvre.  Pour le respect du Droit, et le confort de la Démocratie, le Gouvernement gouverne par voie d’ordonnance jusqu’au moment où  les législatives pourraient être organisées. Cette solution juridique est ce qui est conforme à la démocratie et qui consolide celle-ci.  Le respect du Droit est un impératif pour sortir de ces crises. Pour surmonter toutes les difficultés, il est indispensable que toutes les forces vives de la Nation soient mobilisées et interrogées. On ne peut pas aujourd’hui faire l’économie d’un débat national si l’on veut sortir de l’impasse.  Un homme politique Malien disait : «Il est dangereux de maintenir un peuple vivre dans l’inquiétude et surtout l’incertitude».  

Maître Alfousseyni KANTE est militant FARE ANKA WULI en commune IV du district de Bamako

NB: Le titre et le surtitre sont de la rédaction

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *