La première rencontre entre le président de la République et le nouveau gouvernement, ce vendredi 14 septembre, fut l’occasion de fixer le cap et dégager les priorités du chef de l’Etat. Pour encadrer l’action gouvernementale, Ibrahim Boubacar Keïta recommande au Premier ministre 5 axes majeurs qui devraient constituer les missions essentielles du gouvernement Soumeylou Boubèye Maïga II.
La gouvernance et les réformes politiques et institutionnelles; la promotion d’une croissance inclusive ; le développement du capital humain et de l’inclusion sociale ; l’environnement, le changement climatique et le développement durable ; la diplomatie, la coopération internationale et le partenariat. Voilà les cinq missions essentielles que le président IBK assigne au Premier ministre pour la conduite de l’action gouvernementale.
Après avoir réitéré ses vives et chaleureuses félicitations au Premier ministre, IBK a décliné les grandes lignes de la mission qu’il confie à Boubèye et à son gouvernement. Le président reconnait que cette mission commence dans un contexte socio-politique et économique difficile.
Poursuivre la mise en œuvre de l’Accord
Concernant la gouvernance et les réformes politiques et institutionnelles, au-delà des valeurs et les principes qu’IBK estime défendre, il instruit de poursuivre avec célérité la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, avec comme seul souci la promotion du développement global du Mali. Ceci, dit-il, participe du nécessaire renforcement de la cohésion nationale par la prise en charge des défis sécuritaires.
Aussi, IBK engage-t-il le gouvernement à la poursuite et au renforcement qualitatif et quantitatif des forces de défense et de sécurité, ainsi qu’à l’optimisation des moyens opérationnels pour un maillage cohérent et dissuasif ; faisant ainsi de la force de défense du pays, l’outil de décision politique souhaité.
Des reformes pertinentes
Sur le deuxième axe portant sur la promotion d’une croissance inclusive, IBK dit attendre de SBM et de son équipe une démarche prompte et efficace à travers des réformes pertinentes et ambitieuses, par la transformation structurelle de l’économie nationale, la rendant plus inclusive pour une répartition équitable des fruits de la croissance. Il recommande de relever le défi de la promotion de la finance islamique comme mode de financement alternatif à travers le renforcement et l’accélération de sa mise en œuvre.
Par ailleurs, le président tient à un diagnostic approfondi et sans complaisance du tissu économique afin d’améliorer significativement le niveau de vie des
populations et les recettes de l’Etat.
L’agro-industrie comme levier du développement
IBK demande au Premier ministre de relever les défis liés à la préservation de l’écosystème et des ressources naturelles pour les générations futures, à la modernisation des systèmes de productions, afin d’accroitre la productivité dans le respect de l’environnement socio-économique et culturel des acteurs concernés.
Pour ce faire, il indique de mettre un accent particulier sur la filière coton qui doit nécessairement être réorientée vers la satisfaction des besoins nationaux et sous-régionaux. Aussi, des actions efficaces et efficientes devront-elles être adoptées pour la maîtrise et la gestion rationnelle de l’eau et des surfaces cultivables. Dans cette veine, la prise en compte de la diversification de la production agricole, la poursuite de la mécanisation de l’agriculture basée sur une typologie des exploitations agricoles et la sécurisation foncière sur la base
d’immatriculation des exploitations agricoles. A ses dires, ces mesures permettront d’atteindre les objectifs fixés.
Aussi, le chef de l’Etat appelle-t-il au développement de l’agro-industrie pour la transformation et la valorisation des produits agricoles. Cela permettra sans nul doute la création de valeurs ajoutées dans le monde rural. Ceci, dit-il, doit inciter à créer des centres ruraux de prestation de service pour l’amélioration des conditions de vie en milieu rural.
Par ailleurs, la problématique de la gestion de l’habitat et du foncier doit être réglée par l’amélioration du cadre de vie des populations à travers le développement de l’offre de logements décents pour les revenus faibles et intermédiaires, en partenariat avec les promoteurs immobiliers.
Un accès équitable au foncier
Ferme sur la question foncière, IBK a mis un accent particulier sur l’accès équitable au foncier, sur le renforcement de la gouvernance foncière et domaniale par l’amélioration de la législation en matière domaniale et foncière, du cadre institutionnel et surtout la gestion opérationnelle en matière domaniale et foncière par la mise en place d’un cadastre fonctionnel à travers un guichet unique dans chaque commune de la République. L’identification des espaces urbains, pastoraux et agricoles sera de rigueur.
Concernant le développement du capital humain et de l’inclusion sociale, IBK insiste sur le développement du capital humain et l’inclusion sociale qui, pense-t-il, sont la clé de voute de la réalisation de son ambition pour le Mali. Aussi, ajoute-t-il, que les défis liés à la
problématique de la santé des Maliens, du développement social, de l’efficience de l’action humanitaire, de la place de la famille, de la femme et de l’enfant, occupent une place prioritaire dans son projet de société. Par voie de conséquence, il recommande d’adopter une réforme visant à améliorer l’offre de soins de qualité par le relèvement du plateau technique des services sanitaires sur l’ensemble du territoire national.
Cette réforme devra nécessairement passer par l’adoption et la mise en place d’un régime d’assurance maladie universelle, chose des plus urgentes pour le bien-être de nos compatriotes. La prise en charge des besoins des femmes, des adolescents et des groupes vulnérables en matière de santé reproductive et de protection de l’intégrité physique et morale devra être assurée.
Une éducation de qualité pour tous
Le président de la République est formel sur le développement du capital humain qui doit être entendu par une bonne formation. Il pense qu’il y a lieu d’envisager la réalisation et le renforcement d’une éducation de qualité pour tous, en privilégiant la formation, technique et professionnelle, qui ouvrira plus de perspectives d’emplois pour les jeunes.
Il engage le gouvernement à la promotion de la jeunesse par l’émergence d’un citoyen nouveau, ancré dans les valeurs maliennes et ouvert à l’idéal universel. Pour ce faire, la création d’un conseil supérieur de la jeunesse et d’un centre national de promotion des adolescents et des jeunes devra être envisagée, dit-il. Dans ce cadre, l’employabilité des jeunes doit mériter toute attention de l’équipe.
L’eau et l’environnement au cœur des priorités
En ce qui concerne l’environnement, le changement climatique et le développement durable, IBK affirme qu’il y a lieu de retenir que le pays a connu une pluviométrie très variable et des ressources en eau irrégulièrement réparties sur l’ensemble du territoire national.
A cet égard, il a instruit que le binôme eau/environnement soit au cœur de l’approche gouvernementale. C’est la raison pour laquelle il affirme faire de ce quatrième point de son programme présidentiel un souci majeur au regard du changement climatique et ses conséquences néfastes sur le développement durable.
Dans le contexte de raréfaction des ressources, due au changement climatique, le chef de l’Etat invite à veiller à l’optimisation et à l’amélioration de la gestion de la subvention des intrants agricoles, par une bonne orientation desdites subventions vers les maillons de la chaine de valeur agricole, afin d’assurer leur efficience et leur durabilité.
IBK veut voir l’impact des 15% alloués au secteur agricole
Pour ce faire, il dit qu’il y a lieu de recommander une étude sur l’impact des 15% des ressources, du budget national, allouées aux secteurs agricoles pour une meilleure orientation des actions d’investissements, de promotion de l’emploi et de l’habitat en milieu rural.
Une attention particulière aux secteurs primaire et tertiaire
« En matière d’industrialisation, des défis relatifs à l’industrie, à la promotion des investissements et du secteur privé, au commerce, à l’artisanat et au tourisme par des actions d’amélioration de l’environnement des PME et du climat des affaires devront faire l’objet d’une attention particulière», instruit IBK.
Il pense que les efforts quant à l’accroissement de l’appui de l’Etat aux PME, la restructuration et la mise à niveau des entreprises industrielles durant la période 2018-2023, l’appui à la promotion du commerce par l’accréditation des laboratoires nationaux et la promotion de la certification des produits « Made in Mali » devront être poursuivis.
Le renforcement du désenclavement intérieur et extérieur
En matière d’infrastructures, le président Keïta dit attacher une importance particulière à la poursuite du vaste chantier de désenclavement intérieur et extérieur du pays, ainsi qu’au renforcement et la réhabilitation des infrastructures et des équipements, à l’accroissement de l’offre énergétique, au développement du sous-secteur minier porté essentiellement par les
nationaux formés au métier des mines.
En matière de communication, il demande la mise en œuvre de la politique nationale de l’économie numérique qui ne doit pas être en reste, dans la mesure où le processus de transition numérique mérite d’être parachevé.
Une plus grande ouverture au reste du monde
En ce qui concerne la diplomatie, la coopération internationale et le partenariat, il pense qu’il est inutile de rappeler que le pays ne peut pas évoluer en vase clos en cette ère de mondialisation et de globalisation.
Par conséquent, il recommande de s’ouvrir au monde de mieux en mieux. C’est pourquoi, il affirme que la diplomatie, la coopération et le partenariat devront faire l’objet d’une
attention particulière tel que décliné dans son projet de société. A ce titre, IBK préconise cinq (05) défis à relever, à savoir : la défense des intérêts de notre pays et la protection des Maliens à l’étranger; la mobilisation des ressources financières en faveur du développement du pays; la promotion de l’intégration africaine; l’orientation des fonds de la diaspora en faveur du développement économique du pays; la capitalisation des bonnes pratiques en matière de gestion de la migration.
L’élaboration d’une politique nationale de coopération et de développement
Pour ce faire, il instruit qu’il faudra renforcer la visibilité et l’image du Mali à l’extérieur par l’adoption de la politique nationale de coopération et de développement ; et partant l’actualisation de la carte diplomatique et consulaire de la République du Mali.
Aussi, pour renforcer la promotion et la performance des cadres, le président demande-t-il l’établissement des lettres de mission pour l’évaluation individuelle du personnel diplomatique et la mise en place d’un mécanisme approprié de promotion. Il dit attaché un prix à la réorganisation et au renforcement de la présence du Mali à l’étranger et dans les instances internationales.
Quant à l’’intégration africaine, IBK pense qu’elle passera par plus de visibilité dans la conception et la mise en œuvre des politiques publiques en matière d’intégration par les structures instituées à cet effet.
Enfin, il appelle à l’’amélioration de la politique migratoire qui passera nécessairement par une politique nationale courageuse et son plan d’action. «La protection de nos compatriotes résidants à l’étranger et de leurs biens doit être au cœur des actions de votre gouvernement», soutient-il.
Partant, le président de la République affirme espérer que Boubèye et son équipe attacheront la plus haute importance à cette feuille de route. Aussi, souhaite-t-il voir toutes ses actions traduites dans les faits et ce dans les meilleurs délais pour le bonheur de nos concitoyens.
IBK explique qu’il mettra en place un mécanisme de coordination et de suivi – évaluation permettant d’analyser les progrès accomplis, de déterminer les obstacles et les contraintes dans la mise en œuvre de son programme présidentiel 2018-2023.
Il conclut sa rencontre avec le gouvernement par leur réaffirmer tout son soutien dans l’exercice de sa mission.
Harber MAIGA
Source: Azalaï Express