Terre de tradition migratoire, le Mali est un pays de départ, de transit mais aussi de retour de migrants. La dangerosité des routes contraint certains à renoncer à l’aventure. Quid du rôle de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM)-Mali et ses partenaires contre la migration irrégulière ?
La migration reste un phénomène complexe au Mali, étant donné que le pays est zone de départ, de transit, mais aussi de retour de migrants. Beaucoup de jeunes s’inscrivent sur le départ du Mali, pour des routes migratoires dangereuses, généralement irrégulières.
Plusieurs raisons poussent des milliers de jeunes à emprunter les routes de migration, avec la volonté de trouver mieux pour eux-mêmes. Malheureusement, ils se retrouvent dans des situations difficiles, qu’ils n’ont pas voulues. Soit, ils sont victimes de refoulement ou d’arrestation policière, soit ils sont abandonnés dans le désert, soit dans des centres de détention en Libye, soit dans des centres de transit au Niger. Pour les moins chanceux, c’est le pis : la mort dans le désert, dans l’océan atlantique ou dans la méditerranée.
Joueur titulaire d’une licence en football, Alex ATEM, que nous avons rencontré au centre d’accueil ACCEDIM (Association pour la Cause Commune des Immigrés et des déplacés internes au Mali), dévoile une partie de son parcours de migrant de retour à Bamako. « J’ai pris la route du Maroc pour me chercher. C’est un ami au Maroc qui m’a dit de venir. Mais, le parcours est terrible. Du Cameroun au Nigéria, puis au Mali, j’ai pu atteindre Tamanrasset. La route est tellement terrible. Dans le désert du Mali, tout est argent pour pouvoir traverser. Les groupes armés nous ont dépouillés de tout. La réalité est autre, ce qu’on te dit n’est pas ce que tes yeux iront voir. La vie devient un cauchemar pour moi au Maroc, je suis obligé de revenir à Bamako où je me suis installé », raconte-t-il, désorienté.
Selon Emmanuel N’Gallé du centre dénommé Bloc d’Aide et d’Accompagnement des Migrants (BLAAM), son parcours de migrant tire ses sources des problèmes socio-économiques. « Étant l’ainé de la famille et voyant les conditions dans lesquelles vivent mes parents m’ont obligé à prendre la route de l’Europe dans le but de pouvoir aider la famille, une fois étant là-bas. Hélas ! Peine perdue ».
De retour pays, les migrants vivent dans des conditions plus vulnérables. Ce sont des gens qui ont perdu leur espoir, qui sont éventuellement aigris, par leur parcours migratoire qui, évidemment, ne correspondait pas à leurs attentes. Aussi, ce sont des personnes qui ont soutenu les grand-frères, des chefs de famille, à quitter, en espérant qu’ils puissent quelque part contribuer au bien-être financier de la famille, mais qui malheureusement reviennent parfois les mains vides.
Les réintégrer, les protéger et les soutenir deviennent une nécessité pour leur bien-être, mais aussi pour celui de la société. La migration irrégulière est ainsi un problème qu’il faille juguler. L’État et ses partenaires, notamment l’OIM appuyé par l’Union Européenne, jouent leurs partitions. Depuis janvier, l’OIM a relevé un énorme défi en dotant le Mali de Mécanisme de Référencement National, une première à l’échelle mondiale. Cet outil est destiné à améliorer la qualité des services et de prises en charge des migrants vulnérables de retour ou bloqués sur le territoire malien.
Ce besoin de référencement des migrants permet d’apporter des « soutiens individuels » liés à l’hébergement, la nourriture, amis aussi l’assistance médicale, psychologique, légale et l’accès à la justice et la recherche de famille. L’OIM joue un rôle important dans l’orientation des bénéficiaires à l’autorité ou à l’agence compétence pour leur prise en charge. Selon les statistiques, « l’OIM, depuis 2017, soutient plus de 25000 jeunes hommes et filles dans leur retour au Mali, mais aussi plus de 5000 non Maliens à rentrer chez eux ».
« Pour nous, ce qui est important est que ces personnes obtiennent la même protection que le reste de la population. Notre soutien est de pouvoir mettre en place des mécanismes de réintégration qui vont permettre aux personnes de revenir pour être un atout au niveau de la société », a souligné le Chef de Mission de OIM Mali, Pascal Reyntjens, dans un entretien qu’il nous a accordé.
A titre d’exemple, via l’unité Gestion des frontières, l’OIM a offert samedi 21 mai 2022 des kits de démarrage d’activités au profit de 50 femmes et 50 jeunes des communes de Ménaka et Anderamboukane ayant bénéficié d’un programme de formation professionnelle.
Par ces actions, l’OIM renforce les « efforts du Gouvernement malien dans la stabilisation des communautés par la réinsertion économique des populations à risque ». Le Mali, avec sa politique de migration, sa volonté de s’inscrire dans le suivi, dans le pacte mondial pour les migrations et les objectifs du développement durable, travaille dans cette direction-là.
Quid de la sensibilisation?
Une migration est sûre, ordonnée et régulière, quand « elle peut devenir un atout ». Cependant, l’OIM ne manque pas à son devoir de sensibilisation pour que les jeunes africains changent de mentalité. Elle a organisé, relativement à ses activités psychosociales, un match de football ayant opposé une équipe de migrants aux agents de la Direction Régionale de la Protection Civile de Mopti, le 19 mai sur le terrain du Lycée Hamadoun Dicko de Sévaré. Scénario pareil à Koulikoro avec l’initiation de jeunes lycéens au « Slam » par le groupe Maralinké Officiel, pour la sensibilisation sur la migration irrégulière.
Toutes ces initiatives visent la protection et la réintégration des migrants au Mali, et à améliorer le bien-être des migrants en transit, mais aussi renforcer les liens de cohabitation entre les migrants.
Somme toute, l’OIM et son partenaire UE luttent contre la migration irrégulière. Au niveau individuel, le continent continue à enregistrer des drames. « Mais ils rentrent dans leurs familles puis contribuent à la société », rassure le Chef de la mission OIM Mali.
Cyril Roc DACK/ Icimali.com