Sécurité

Réintégration des ex-rebelles : La compromission de trop

Pendant la crise qui s’est déclenchée en 2012, ils étaient nombreux à trahir leurs corporations et leur patrie pour rejoindre les mouvements rebelles dans la partie septentrionale du pays. Ils ont pris des armes contre leur pays, combattu leurs frères d’armes au nom de la partition du Mali. Après l’échec de leur projet séparatiste, ils veulent réintégrer l’armée malienne alors qu’ils sont auteurs de plusieurs exactions contre les populations civiles et même contre leurs frères d’armes.

En effet, ils sont 420 militaires déserteurs de l’armée malienne sur un millier à répondre à l’appel du gouvernement pour regagner les rangs comme édicté par l’accord pour la paix et la réconciliation. Mais ces déserteurs vont-ils être réintégrés avec les mains tachées de sang ? Sont-ils sincères lorsqu’ils disent qu’ils sont prêts à servir le Mali de nouveau, qu’ils reconnaissent comme leur seul et unique patrie ?

En effet, le lundi 11 février dernier, le chef d’état-major général des Armées, le Général de Division M’Bemba Moussa Keïta a rencontré, à l’Ecole Nationale de la Gendarmerie de Faladiè, les déserteurs de l’armée, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation. Ils sont 420 ex-rebelles, officiers, sous-officiers et militaires du rang à regagner les rangs des FAMAs. Ils seront appelés à suivre un recyclage avant leur redéploiement.

Les officiers sont hébergés à l’école de la Gendarmerie, les sous-officiers à Markala et les militaires du rang à Ségéla. En tout cas, c’est ce qu’a annoncé le Général Keïta qui, au nom du chef suprême des Armées et du ministre de la Défense et des Anciens Combattants, leur a souhaité un bon retour dans les rangs.

Selon lui, le retour de ces ex- FAMAs permet de matérialiser les aspects défense et sécurité de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation.

Cependant, ce qu’il occulte, c’est que  l’institution militaire est fondée sur les principes de discipline et de loyauté qui ont été foulées au pied par ces ex-militaires dans une logique de séparation du pays. Alors, faut-il toujours encourager la réintégration des ex-rebelles dans l’armée à chaque fois qu’ils prennent les armes contre leur pays ?

Oui à un compromis et non à la compromission. Avec la signature de l’Accord, l’Etat a fait des compromis, mais réintégrer les déserteurs après chaque acte de trahison est une compromission que le gouvernement ne doit plus accepter car sans la justice, l’on ne peut prétendre à une paix durable.

Le cas de ces  « traîtres » devrait d’abord être traité par la justice afin que cela serve de leçon pour d’autres. Au moins, par respect aux vies sacrifiées et à la fidélité de ceux qui se battent quotidiennement contre les terroristes qui ont profité de la situation.

« C’est ainsi depuis l’avènement de la démocratie. Ce qu’ils font, ce n’est pas ce qui fait mal, mais voir que nos dirigeants qui voient bien leur combine acceptent de les suivre. Même ceux-ci vont trahir dans les 10 ans à venir. Un traître restera toujours un traître et il n’a pas sa place au sein de l’armée. Pour des raisons politiques, l’Etat peut les radier sinon dans le code des militaires, ils doivent tous être fusillés », a déclaré Ousmane Yattara, un enseignant à la retraite.

Selon notre interlocuteur, ces mouvements signataires n’ont pas abandonné leur projet de partition du pays. Mais, c’est sous la pression de leur protecteur qu’ils ont accepté de signer l’accord de paix.

Face à cette situation dit-il, l’Etat ne doit aucunement accepter de rentrer dans leur jeu qui pourra lui coûter très cher.

Si certains ont répondu à l’appel du gouvernement qui se dit satisfait du retour de ces militaires déserteurs, la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), qui est composée des principaux groupes rebelles, affirme ne pas être concernée et qu’elle se référera à un projet de décret devant fixer les modalités de reclassement des ex-combattants.

Bien que ce processus soit l’une des dispositions phares de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, le cas de ceux qui avaient abandonné les rangs de l’armée pour la rébellion mérite réflexion. Idem pour les autres combattants qui doivent être soumis à des vérifications de la part d’une commission indépendante composée de plusieurs parties afin de déterminer s’ils n’ont pas commis de graves crimes.

Moussa Sékou Diaby

Source: Le Tjikan

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