Le silence aura été long. Trop long, diront certains. Mais voilà que le paysage politique malien semble à nouveau s’animer, réveillé par un coup de tonnerre : la proposition de dissolution des partis politiques. Une idée qui n’est pas passée inaperçue, tant elle touche au cœur même du jeu démocratique.
En réponse, les vieux partis, longtemps engourdis par le climat politique, se dressent à nouveau, décidés à rappeler qu’ils ne sont pas morts.
Le « Meeting-restitution » prévu pour le 27 avril, déjà annoncé à grand bruit, aurait dû être le théâtre de ce réveil. Mais voilà qu’il est apparemment empêché. Prétexte logistique ou manœuvre politique ?
Dans un communiqué sibyllin, Nouhoum Togo évoque l’indisponibilité de toutes les salles prévues pour l’événement. En guise d’alternative, un point de presse est proposé pour le 26 avril. Moins spectaculaire, certes, mais peut-être tout aussi symbolique : la parole politique reprend ses droits.
« Ils essaient de nous enterrer, mais ils ne savent pas que nous sommes des graines », lance Yaya Sangaré de l’ADEMA-PASJ, dans une formule qui en dit long sur l’état d’esprit de l’opposition. Le message est clair : ce n’est pas parce que les voix se sont faites discrètes que la résignation a gagné. Le terrain est peut-être miné, mais l’instinct de survie démocratique est encore vivace.
Car les souvenirs sont tenaces. Le Mali n’a pas oublié 2020. Cette année-là, des foules massives, galvanisées par un profond ras-le-bol, ont fait vaciller puis chuter le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta. Aujourd’hui, un parfum de déjà-vu flotte sur Bamako. Même ressentiment, mêmes alertes, mêmes risques. À vouloir museler les partis, on pourrait bien réveiller la rue.
Alors, retour aux vieux démons ? Peut-être. Mais ce retour est aussi celui d’un sursaut. Celui d’une scène politique qui, malgré ses travers, refuse de disparaître sans livrer bataille. Les jours à venir diront si le pouvoir entend la colère sourde qui monte, ou s’il choisira la voie de la répression.
Quoi qu’il en soit, le Mali s’apprête à vivre une séquence politique cruciale. Et dans cette épreuve de force qui s’annonce, chacun devra mesurer la portée de ses actes. Car les graines semées aujourd’hui pourraient bien déterminer le visage du pays demain.
Cyril Roc DACK