Infirmier vétérinaire à la retraite, le vieux Malick n’a pu, après 40 ans de service, bénéficier ni d’un lot à usage d’habitation, ni même d’un vélo pour se rendre à son champ situé à Sanankoroba.
Comme tant d’autres fonctionnaires maliens connus pour leur intégrité mais qui, après plusieurs années de service bien accompli vivent aujourd’hui dans des paillotes ou sont devenus des clochards, M. Malick, marié et père de 12 enfants s’était résigné à son triste sort et avait élu domicile dans la banlieue bamakoise de Yirimadio.
Là, humblement, mais dignement, il arrivait à payer régulièrement ses frais de location. Et, tant bien que mal, à subvenir aux besoins de sa famille.
Hélas, en janvier dernier, le vieil homme a été terrassé par la maladie.
Depuis, Malick était couché sur son lit en compagnie d’un gros chien noir qu’il élevait depuis plusieurs années. Un chien, si docile que l’on ignorait même son existence dans la concession.
Mais, la mort dans sa cruauté a arraché le vieux vétérinaire à l’affection des siens le 13 avril dernier aux environs de 9 heures.
Amis et proches ne tardèrent pas à envahir la maison de Malick, étalé sans vie dans sa chambre.
Le gros chien noir, comme pour pleurer son maître s’était mis sous le lit du défunt.
Ainsi va la vie, et aux environs de 16 heures, l’Imam était invité à faire des bénédictions ‘’privées’’ au mort.
Marchant nonchalamment, notre marabout s’introduisit dans la chambre du défunt. Mais, à peine y était-il rentré, qu’il entendit un grongnement : celui du chien sous le lit.
L’Imam sortit rapidement de la chambre et demanda de rentrer chez lui, prétextant avoir oublié son chapelet et du “nassi” et invita son second à s’occuper des bénédictions. Ce dernier n’hésita pas.
Il fit irruption dans la chambre du défunt. Pas pour longtemps… car le chien du défunt avait cette fois quitté sa cachette et semblait vouloir lui sauter au cou.
Le marabout ‘’remplaçant’’ n’eut cependant pas la possibilité de détaler. Son boubou étant resté coincé par la porte.
Du coup, le petit salon qui bondait de monde s’est vidé de ses occupants.
La veuve du défunt qui venait d’assister à la scène, s’empressa d’expliquer la “situation” aux fidèles.
Trop tard ! Les uns cherchaient leurs chaussures, les autres étaient déjà loin des lieux.
Finalement, le calme était revenu et le silence devenu lourd.
C’est en ce moment que l’on libéra le marabout (coincé par la porte et le chien) devant la chambre du défunt.
Notre “homme de Dieu” avait mouillé de sueur son boubou et même… son pantalon.
Il ne put regagner la foule, qu’après que madame Malick lui eut emprunté des habits du défunt.
Quant à son patron (le premier Imam), il n’a été revu sur les lieux que… le 3e jour du deuil. Allah Akbar !
Boubacar Sankaré
26 Mars