L’Etat a réduit la subvention des engrains destinés aux paysans de 50% dans la zone office du Niger. La campagne agricole est menacée et les paysans sont révoltés contre Bamako
Le ministre de l’Agriculture, Baba Moulaye Haïdara et le Secrétaire d’Etat auprès de ce dernier, chargé de l’Aménagement et l’Equipement rural, Adama Sangaré ont procédé le lundi 8 juillet au lancement de la campagne agricole 2018-2019 de l’Office du Niger, à M’Béwani, situé à 70 km de Ségou. Tous les officiels de la région étaient présents, ainsi que le président de l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture du Mali, Bakary Togola. Seulement voilà : au cours de cette cérémonie, le porte-parole des paysans, Abdoulaye Daou, a été fortement applaudi par les paysans pour avoir dénoncé la réduction de la subvention des engrais par l’état. Selon lui, 50% de la subvention manquent à l’appel, ce qui fait que les objectifs de production ne seront pas atteints. Avec conviction et éloquence, le délégué général des exploitants agricoles soutient haut et fort que les 820 000 tonnes de riz paddy, annoncés comme objectif ne pourraient pas être atteints. Il a même lâché le mot : « La campagne est compromise, à cause des engrais ».
Le délégué Abdoulaye Daou n’a pas manqué d’attirer l’attention du ministre sur le fait que ce sont les exploitations agricoles familiales qui ont été servies, les autres n’ont rien reçu dans l’engrais subventionné. Ce qui crée un grand mécontentement chez les paysans de la zone Office du Niger.
« Nous aurions dû manifester à votre arrivée, nous l’avons pas fait. Après votre départ, nous resterons sereins. Cependant, monsieur le ministre, nous vous demandons d’être notre porte-parole auprès du Président de la République et du Premier ministre, lesquels accordent une importance capitale pour le secteur de l’agriculture, d’agir vite, très vite, pour sauver la situation, en envoyant des engrais subventionnés sur le terrain. Nous comptons sur votre engagement, monsieur le ministre, pour expliquer la gravité de la situation à Bamako.
Nous sommes conscients des difficultés que vit notre pays. Mourir par balle vaut mieux que de mourir par la faim, parce qu’au passage, tu auras perdu tout honneur, toute dignité (il l’a dit en BAMANAN, excusez-moi si la traduction n’a pas été fidèle). Avec nos opportunités, nous pouvons faire vivre tout le pays. Il faudra rapidement remettre toute la subvention à sa place, pour éviter des tensions sociales», a-t-il expliqué, avant de saluer la détermination du ministre, qu’il dit savoir préoccupé par cette situation.
Même son de cloche à Kolongo, dans le cercle de Macina où le ministre est parti visiter, le mardi 9 juillet, le projet Malibya, installé sur 100 000 ha. Il a été accueilli par des dizaines d’élèves, des jeunes, des femmes, des hommes, arborant un drapeau malien et criant de toutes leurs forces : « On a besoin d’engrais ! On a besoin d’engrais ! On a besoin d’engrais !… »
A M’Béwani aussi bien qu’à Kolongo, le discours du ministre reste invariable : « Nous allons étudier la question et nous ferons tout ce qui est dans notre possibilité », a-t-il développé. Il n’a pas manqué de rappeler aux uns et aux autres, la crise multidimensionnelle que connait notre pays, et le sacrifice que chaque malien doit consentir pour dépasser ces moments difficiles.
En tout cas, les pays que nous avons approchés ne veulent rien comprendre. Pour eux, aucune crise ne doit justifier la réduction de la subvention à hauteur de 50%.
Pour Issa Diarra, paysan de son état, « le budget alloué à l’agriculture fait 15% du budget d’Etat. Les 15% n’ont pas été réduits, alors pourquoi cette réduction de 50% de la subvention. Nous sommes des pauvres et nous avons toujours apprécié le soutien de l’Etat. Pourquoi veut-il nous lâcher ? », S’est-il interrogé.
Incompréhension et colère chez cet autre paysan, qui a refusé de dire son nom : « IBK a eu son second mandat, il ne veut plus nous aider. Certains viendront nous dire qu’ils vont remettre la subvention à sa place, nous allons les suivre. Le parti d’IBK, le RPM, n’aura plus rien dans notre zone si la situation demeure inchangée »
Voilà la grogne des paysans. Elle doit être prise au sérieux dans la zone Office du Niger, avant que d’autres politiciens ne s’en mêlent pour en faire une affaire d’Etat.
Elhadj Chahana Takiou, envoyé spécial
22 Septembre