Au Burundi, on ne blague pas avec la photo ou l’image du président. Trois écolières de la province de Kirundi, dans le nord-est du Burundi ont été arrêtées la semaine dernière pour des gribouillages sur une photo du président Pierre Nkurunziza. Les adolescentes ont été emprisonnées mercredi en attendant leur procès, selon une ONG et d’une source judiciaire.
La Chambre de conseil, – un collège de trois juges chargés de statuer sur la détention -, a décidé “que les trois fillettes âgées de 15, 16 et 17 ans et qui sont poursuivies pour outrage au chef de l’Etat, soient écrouées” à la maison d’arrêt pour mineurs de Ngozi, dans le nord, a déclaré mercredi à l’AFP le FENADEB, une plate-forme qui regroupe 48 associations de la société civile burundaise.
Les trois écolières risquent jusqu’à cinq ans de prison et 250 euros d’amende pour “outrage à chef d’Etat”, selon le code pénal burundais.
La décision des juges a été confirmée par une source judiciaire qui a précisé que les écolières ont écrouées dès mercredi après-midi.
Le dossier jugé “très sensible” est “géré directement par le procureur général de la République qui se trouve à Bujumbura”, selon la même source.
Trois autres écolières qui avaient été arrêtées en même temps que leurs camarades ont été “blanchies” et libérées par la même chambre dès vendredi, a-t-on précisé de même source.
Les six filles, accusées d‘être responsables de gribouillages trouvés sur une photo du président burundais dans cinq livres de sciences humaines appartenant à leur école, l’Ecole fondamentale d’Akamuri de Kirundo, ont été arrêtées sur ordre du procureur de Kirundo le 12 mars.
Un écolier de 13 ans interpellé dans la même affaire avait été immédiatement relâché car il n’avait pas la majorité pénale fixée à 15 ans au Burundi, selon la FENADEB.
“Cela faisait trois ans qu’aucun responsable n’avait contrôlé ces livres, ce qui n’a pas empêché le directeur d’incriminer toutes celles qui ont eu ces livres entre leurs mains au cours des dernières semaines”, s’était insurgé un de leurs enseignants, sous couvert d’anonymat. Il avait souligné que “les livres passent de main en main et de classe et en classe parce qu’il n’y en a pas assez pour tous les écoliers”.
Plusieurs écoliers avaient été condamnés en 2016 jusqu‘à 20 ans de prison pour outrage au chef de l’Etat et atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat, et des centaines d’autres exclues de leurs établissements dans des cas similaires.
Ils avaient finalement été blanchis et réintégrés dans les écoles face au tollé international suscité.
“Les autorités devraient s’attacher à faire en sorte que les auteurs de violations graves des droits humains rendent des comptes plutôt que d’emprisonner des écolières pour des griffonnages”, a déclaré jeudi Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale de Human Rights Watch.