Le Vérificateur Général a, officiellement, remis au Président de la Transition, Bah N’Daw, le vendredi 30 octobre dernier, son Rapport annuel (2019). Ce document concerne 31 entités de l’Etat qui ont fait l’objet de vérifications financières, en termes de performances et de suivis et recommandations. Ces différentes vérifications ont permis de déceler plusieurs cas d’irrégularités financières qui se chiffrent à environ à 15 milliards FCFA. Maintenant, l’opinion s’interroge sur le traitement qui sera donné aux différents dossiers. Seront-ils rangés dans les tiroirs ? Ou la justice va-t-elle sévir contre les auteurs de ces détournements ?
Dans le cadre de sa mission de vérification de la régularité et de la sincérité des opérations financières et administratives des services publics et parapublics, le Bureau du Vérificateur Général a effectué des missions de vérifications dans plusieurs services. Ainsi, le Rapport 2019 a été officiellement remis au Président de la Transition, Bah N’Daw, le vendredi 30 octobre dernier. Les pertes financières engendrées par l’Etat sur les 31 missions de vérifications effectuées dans plusieurs ministères et certains grands services sont chiffrés à 300,613 milliards de FCFA. La palme du manquement à l’orthodoxie financière est détenue largement par des sociétés minières du pays. Les sociétés des mines de Syama a fait une perte de 227, 87 milliards de FCFA, suivies des sociétés des mines d’or de Loulou, Goukoto avec 60,53 milliards de FCFA. L’AMRTP et l’ORTM sont épinglés pour 4 milliards de FCFA de pertes. L’Ambassade du Mali au Burkina Faso pour 1,84 milliard de FCFA. La Mairie de la Commune II est incriminée pour 153,64 millions de FCFA et le Ministère des Affaires religieuses et du Culte pour 639,86 millions de FCFA.
Les mines en ligne de mire
Aussi, des irrégularités financières ont été constatées dans la gestion des sociétés minières (Somilo-sa, Gounkoto-sa et Somisy-sa) par l’équipe de vérification s’élèvent à 60,53 milliards de FCFA dont les principales explications se présentent comme suit : – Le Directeur Général de Randgold Resources Limited (RRL) est épinglé pour n’avoir pas retenu l’Impôt sur le Bénéfice Industriel et Commercial (IBIC) sur les prestataires étrangers de Gounkoto-SA non couverts par une convention de non double imposition pour un montant de 294,73 millions de F CFA.
- Le Conseil d’Administration de SOMILO-SA est aussi cité pour n’avoir pas autorisé la distribution des dividendes dus à l’Etat malien pour un montant de 26,21 milliards de FCFA au titre des exercices 2015, 2016 et 2017.
- Le Directeur Financier de RRL pour avoir pris en compte, dans les Etats financiers de SOMILO-SA, des charges d’intérêts d’emprunts non justifiés pour un montant de 2,08 milliards de FCFA. « Il s’agit des intérêts de deux emprunts inscrits, dans les états financiers, aux noms de l’État du Mali et de RRL sans documents justificatifs », rapporte le Rapport.
- Le Directeur Général de RRL d’avoir passé des contrats d’emprunts irréguliers pour le compte de SOMILO SA. Les conventions de prêt, objet desdits emprunts, devaient être autorisées uniquement par les Administrateurs de l’Actionnaire non prêteur, en occurrence les Administrateurs représentant l’Etat malien. « Ce qui n’a pas été le cas », est indiqué dans le Rapport. Le montant des intérêts payés sur ces emprunts irréguliers s’élève à 31,93 milliards de FCFA, révèle le Rapport 2019 du Bureau du Vérificateur.
Plusieurs autres services épinglés
C’est ainsi que l’ex-DG de l’ORTM et ancien Député de Kolondiéba, Sidiki N’Fa Konaté, et son comptable, Salif Konaté, ont été placés sous mandat de dépôt. Il est rattrapé par le Rapport du BVG qui lui reproche des irrégularités financières de plus de 4 milliards de FCFA lorsqu’il était à la tête de l’ORTM.
Plusieurs Représentations diplomatiques et consulaires de notre pays ont aussi fait l’objet de missions des enquêteurs du vérificateur Général. Aussi, la vérification des Représentations diplomatiques a décelé une irrégularité financière de près de 2,7 milliards de Fcfa. Celle de la Mairie de la Commune II du District de Bamako a fait ressortir des irrégularités financières qui s’élèvent à 153,64 millions de Fcfa composées principalement de l’utilisation non justifiée par le Maire de la Commune II du don de l’Ambassade de Chine d’un montant de 28,90 millions de Fcfa ; du paiement des salaires aux Agents recrutés sans délibération du Conseil communal pour un montant de 7,02 millions de Fcfa ; de la non perception d’un montant de 314 400 FCFA correspondant aux 10% des frais d’édilité dus à l’État ; de la non perception des recettes de location de magasins d’un montant de 10,36 millions de FCFA ; du non reversement des recettes issues de la délivrance d’actes de mariage pour un montant total de 35,70 millions de Fcfa ; de l’utilisation de la subvention Anict à d’autres fins pour un montant de 16,82 millions de FCFA ; du fractionnement des dépenses pour un montant de 54,53 millions de FCFA
Des recommandations ont concerné des vérifications initialement réalisées entre 2016 et 2017.
Les vérifications réalisées en 2016 ont porté sur les opérations de recettes et de dépenses du Centre hospitalo-universitaire du Point G, les opérations de dépenses effectuées et de conformité des conventions et contrats de l’Énergie du Mali-sa, les opérations de dépenses et de recettes du Laboratoire central vétérinaire (LCV). Et celles réalisées en 2017 ont porté sur la gestion financière de l’Autorité de régulation des marchés publics et des délégations de service public (ARMDS) ; les opérations de recettes et de dépenses de la Trésorerie régionale de Mopti (TRM) ; les opérations de recettes et de dépenses de la Direction Régionale du Budget de Mopti (DRB-M) ; l’exécution budgétaire de la Direction Régionale du Budget de Ségou (DRB-S); les procédures de création et d’exploitation des établissements de santé privés dans les Districts sanitaires de Bamako et Sikasso.
Les irrégularités financières consécutives à la gestion des Autorités administratives indépendantes et des organismes personnalisés, notamment l’Autorité malienne de régulation des télécommunications/tics et postes (AMRTP), l’Office de radio et télévision du Mali (ORTM), l’Agence malienne de radioprotection (AMARAP), l’Office malien de l’habitat (OMH) et la Pharmacie populaire du Mali (PPM) s’élèvent à plus de 541 millions de FCFA.
Toujours, selon le Rapport, les irrégularités financières décelées sur les opérations de recettes et de dépenses liées au pèlerinage à la Mecque s’élèvent à 639,86 millions de FCFA dont les principales portent sur l’enregistrement gratis irrégulier au profit d’un titulaire de marché pour un montant de 46,71 millions de FCFA ; le paiement indu à une agence de voyage pour un montant de 50 millions de Fcfa ; le non-paiement des droits d’enregistrement pour un montant de 19,57 millions de FCFA ; le non-paiement de la redevance de régulation pour un montant de 12,47 millions de FCFA ; l’octroi d’indemnités indues au personnel du Consulat pour un montant de 7,65 millions de Fcfa ; le paiement d’indemnités de mission non justifiées pour un montant de 13,5 millions de FCFA; la double utilisation des mêmes pièces pour justifier deux dépenses pour un montant de 4,28 millions FCFA ; les dépenses irrégulières effectuées par l’Agent comptable de la MDH sur le fonds épargne pèlerinage pour un montant de 130,68 millions de Fcfa ; l’émission irrégulière de chèques au nom du Régisseur d’avances ordinaire pour des retraits non justifiés sur les fonds destinés à la prise en charge de la Commission nationale d’encadrement pour un montant de 225 millions de Fcfa ; les dépenses inéligibles effectuées sur les fonds destinés à la prise en charge de la Commission nationale d’encadrement pour un montant de 130 millions de FCFA.
Mémé Sanogo
Source: L’Aube