Alors qu’elles représentent plus de 51% de la population malienne, les femmes, bien que soutenues par la loi 052 du 18 décembre 2015 instituant des mesures de promotion du genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives, sont minoritaires au sein de l’action politique et publique. Des efforts sont attendus pour renverser la tendance.
Pour promouvoir le droit politique et la participation des femmes à la vie politique et publique, garantissant une meilleure représentativité de la gent féminine dans les structures étatique et privée de notre pays, il est important d’accorder une attention particulière à la condition sociale des femmes
La pesanteur des tâches familiales et le statut social n’accordant pas de parole à la femme sont entre autres des facteurs qui défavorisent inexorablement la couche féminine dans la société malienne, très conservatrice, malgré l’invasion de la civilisation étrangère.
Cette situation doit être renversée en vue de permettre à la femme de jouer son rôle et tout son rôle en démocratie au bénéfice de sa communauté. Pour cette raison les plus hautes autorités de notre pays, en 2015, ont institué la loi 052 pour promouvoir les femmes dans les postes nominatifs et électifs.
Ainsi donc, selon un rapport de WILDAF, en 2015, un changement progressif de la nomination de femmes dans des institutions de la République a été constaté. A cette date, le nombre des femmes à la Cour Constitutionnelle était de 41,7%, à la Cour suprême, il était de 29 %, 26% à la Présidence, 15,3% au Conseil Économique Social et Culturel, 13% à l’Assemblée Nationale et la Primature, 9,1 % à la Haute Cour de Justice et 7,3% pour le Haut Conseil des Collectivités. Entre 2014 (15,6%) et 2015 (16,2%), on note donc une légère augmentation de 0,6% des nominations des femmes dans les fonctions publiques.
Il faut rappeler le problème d’élection des femmes aux postes électifs, malgré les bienfaits de la loi 052 reste entier. Candidate aux présidentielles en 2013, Mme Aminata Diallo, dont la candidature a été rejetée par la Cour Constitutionnelle au motif qu’elle n’a pu avoir les soutiens nécessaires pour remplir les conditions prescrites, a estimé que le système de parrainage joue énormément en défaveur des femmes. « Certains refusent de parrainer parce qu’elle est tout simplement une femme », regrette Mme Diallo.
En Commune I du District de Bamako, le mal semble être connu des élus communaux qui ont décidé de rectifier le tir pour que la femme élue puisse jouer sa partition au développement de sa circonscription au même titre que les hommes. Selon le chargé à la communication de la Mairie Commune 1, Abdoul Aziz Diallo, les dernières élections communales ont vu une participation massive des femmes. Pour l’élection communale passée, explique-t-il, il y avait onze (11) candidatures féminines sur 43 hommes.
Selon lui, au niveau de la Mairie de la Commune 1, le genre est bien respecté. Sur les dix mairies secondaires, cinq sont gérées par les femmes, notamment Sotuba, Fadjiguila, Chicoroni, Banconi et Doumanaza.
Conseillère municipale en Commune I, Mme Korotoumou Traoré, non moins présidente de la commission partenariat genre, indique qu’une commission est mise en place pour faire la promotion du genre et tous les sujets de partenariat entre la mairie et d’autres structures.
« Le rôle de la femme est très importante voire primordial, car les femmes sont au cœur de toute la campagne avant les élections et après élections. Les femmes ne sont pas là seulement pour faire campagne, pour donner plus de voix aux hommes ; elles occupent plus de 51% de la population malienne et doivent être plus considérées dans la politique », a-t-elle soutenu.
D’après elle, la loi 052 a eu un effet considérable, mais les femmes n’ont pas encore eu de satisfaction totale de la chose. Au niveau des mairies, poursuit-elle, cette loi a été appliquée lors des élections communales en 2016, raison pour laquelle je me suis retrouvée au conseil communal.
« L’application de cette loi 052 a considérablement changé la donne. Elle a permis l’éveil des consciences des femmes. Les femmes ont aussi un rôle important à jouer dans la société, elles ont leur mot à dire sur toutes les questions fondamentales. Et nous voyons que, de plus en plus, dans nos brousses ainsi que dans nos villes, les femmes commencent à s’organiser, à diriger et à réussir parfois là où les hommes ont échoué ou échouent. Donc nous pouvons dire aisément qu’elles s’intéressent de plus en plus à la politique », constate Demba Dembélé, ancien président de l’alliance nationale des patriotes du Mali.
Vendeuse de galette devant la mairie de Korofina, Mme Fanti Cissé argue que la grande difficulté des femmes en politique s’explique du fait que celles-ci ne se soutiennent pas, la rivalité aidant. « Plus de la moitié de la population est analphabète avec 51% des femmes. Ce qui explique le faible taux de participation des femmes à la politique », souligne-t-elle. Avant d’ajouter que les femmes ne connaissent pas la politique, laquelle n’est pas non mieux expliquée à elles.
« On nous donne du thé et du sucre, parfois 2000 FCFA pour aller voter. Nous prenons, puis nous accordons notre voix, la plupart du temps, sans connaître le candidat en personne. On nous montre seulement les logos du parti », détaille la vendeuse de galette.
Réparateur de moto à Hippodrome, Amara Sylla avait toujours pensé que la politique était principalement pour les hommes intellectuels. Car, dit-il, si un illettré se lance en politique, il risque d’être roulé, manipulé et exploité par les instruits. « Chez nous les Soninkés, la femme est faite pour s’occuper du foyer et des enfants. Une femme politicienne est mal perçue par la plupart d’entre nous », a-t-il rappelé.
Somme toute, les partis politiques doivent revoir leurs pratiques et valeurs pour plus de participation et de représentation politiques des femmes.
Hatouma Siré Traoré/ Icimali.com