Bamako, le 31/05/2021
La jeunesse Malienne
J’adresse cette lettre à la jeunesse malienne. Vous êtes présentée comme l’avenir de la Nation. Vous êtes très souvent approchée pour donner votre voix ou pour soutenir des causes qui nécessitent une adhésion populaire. Malheureusement, vous n’êtes pas toujours informée des enjeux qui se cachent derrière les sollicitations et vous êtes souvent les grands oubliés des politiques de promotion et d’autonomisation. Quand on regarde nos contextes, combien de jeunes arrivent à subvenir à ses besoins, à trouver des formations de qualité, à accéder à des emplois ou à vivre avec dignité ? Combien parmi vous, si l’occasion se présentait, déciderait de quitter le Mali pour poursuivre des études à l’étranger ? Combien parmi vous ont tenté les chemins de la migration économique pour trouver les ressources nécessaires pour les besoins ? Combien ont perdu la vie dans cette longue et lourde quête de la liberté ?
Au Mali, les problèmes des jeunes sont nombreux et les réponses sont extrêmement rares. Nous sommes souvent portés à chercher ailleurs les réponses à nos problèmes. C’est ce qui se passe pour trouver une formation, un emploi ou une opportunité. Ce sont souvent les familles privilégiées, par les capacités de financement, qui tirent avantage de cette quête. La majorité des familles, plus modestes, fondent l’espoir sur les prières. Parfois, contraints par les incitations, des jeunes se tournent vers la tricherie, la violence ou l’extrémisme comme solutions face aux nombreuses difficultés. D’autres jeunes encore préfèrent des bouts de rue sous les arbres à prendre le thé en longueur de journée et de nuit que de nuire à qui que ce soit. Ces problèmes des jeunes interrogent nos modèles de gouvernance et nos systèmes d’administration de ces questions. Ils prennent encore plus d’importance dans ce moment charnière de l’Histoire du Mali où nous devons choisir la liberté à toute autre chose.
Vous assistez depuis quelques jours à des événements qui perturbent profondément le fonctionnement des institutions. La transition qui a mal démarré s’est confrontée à un nouveau coup de force et l’installation d’un pouvoir militaire en recherche de légitimation. Dans ce contexte encore, nous avons le regard tourné ailleurs : vers les décisions de la communauté internationale (la CEDEAO, la France, La Russie et autres) pour qu’elle nous dise qui nous devrons être. Et si nous regardons nos problèmes en face ! A la jeunesse malienne d’interrompre immédiatement ce processus qui consiste à laisser les autres décider de ce qui est utile ou nécessaire pour nous, de ce que nous devons faire ou même de ce que nous devons penser. A la jeunesse malienne d’observer nos contextes et les réponses apportées avec un minimum de clairvoyance et de jugeote pour épouser des valeurs et soutenir des idées qui nous portent vers les sommets les plus élevés. La crise actuelle est la conséquence de tous les choix qui auraient dû être fait avec courage mais qui ne l’ont pas été. Elle est la conséquence d’une manipulation de la jeunesse pour obtenir son adhésion sur des contrefaçons de valeurs. Elle est la conséquence de toutes les injustices érigées en norme dans la société malienne. A la jeunesse malienne de prendre ses responsabilités et de décider de marcher vers la liberté. Vous êtes une jeunesse vigoureuse et qui a tant de ressources face à l’adversité. Il reste à faire de cette force un atout pour exiger de ce qui vous revient de droit. Comprenez que la vraie force d’un tisserand est de se consacrer avec discipline à son art pour maîtriser son fonctionnement et définir son évolution en réponse aux besoins des populations. Il en est de même pour l’art qui consiste à forger ou l’art qui consiste à lier le bois au bois. Le principe est exactement le même pour l’art militaire : sa fonction est d’assurer la défense. Il ne doit sous aucun prétexte être détourné de cette mission par des péripéties politiciennes.
Pour réussir cette transition, nous devons la bâtir sur des bases saines : demander le retour des militaires en caserne et exiger des projets de société qui garantissent l’émancipation, l’indépendance et la liberté de la jeunesse malienne. Bâtir un Mali nouveau et qui répond à nos besoins nécessitera plus d’engagement de la jeunesse. Ne soyons pas perdu pour le Mali et perdu pour nous-même. Nous pouvons relever ces défis. Nous pouvons être libres.
Marchons ensemble vers la liberté
Dr. Tiefing S Dr. Tiefing S Dr. Tiefing S issoko issoko issoko
Pour le Mali