Répartition de 510 ha aménagés à San : Les couches défavorisées aux oubliettes ; Gouverneur, préfet, maire… se taillent la part du lion ; des affrontements évités grâce à la justice
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Répartition de 510 ha aménagés à San : Les couches défavorisées aux oubliettes ; Gouverneur, préfet, maire… se taillent la part du lion ; des affrontements évités grâce à la justice

Omission des couches vulnérables et violation des lois. La répartition des 510 hectares aménagés par l’Etat du Mali et LUXE DEV, coopération Luxembourgeoise pour le Développement, faite par l’Association des Riziculteurs de la Plaine de San Ouest (ARPASO) a provoqué un tollé dans la ville de San. Saisie par le Collectif des jeunes pour la Refondation de San (CORESA), marginalisé dans le partage, la justice met toute la superficie en dépens. Nous faisons le point.

Nous sommes en 2019. L’Association des Riziculteurs de la Plaine de San Ouest (ARPASO) est érigée en Société Coopérative. Elle bénéficie, par la suite, de nombreux appuis de la part de LUXE DEV. Un projet d’aménagement de 510 ha est lancé au bénéfice des exploitants de la région et pour lutter contre l’exode rural des jeunes sans emploi. Dans le cadre de sa coopération avec l’Etat malien, LUXE DEV a aménagé 372 hectares. Et l’Etat du Mali, 138 ha pour compléter le projet.

Le travail d’aménagement terminé, il nous est revenu que la Société coopérative ARPASO a immédiatement mis en place une commission d’attribution et d’installation. Le 16 août 2021, la liste des bénéficiaires du site aménagé est publiée. Débutent alors des démarches du Collectif pour dénoncer la répartition qui, selon lui, a été faite en violation du critère qui exige que le bénéficiaire doit être âgé entre 18 à 40 ans.

« La répartition, c’est une question technique. Mais, ARPASO a fait un travail d’amateurs. Ses membres ont mis une commission qui n’est pas consensuelle pour distribuer entre eux la terre sans pour autant faire la purge, c’est-à-dire, prendre en compte des propriétaires coutumiers de la terre et les anciens exploitants. Donc, tout le problème est parti de la commission », explique notre interlocuteur basé à San.

L’autre aspect qui constitue une violation des lois, ajoute-t-il, est le non-respect de la loi sur le foncier agricole, lequel accorde 15% des terres aménagées de l’Etat aux couches vulnérables, issues des Associations des femmes, des jeunes et des handicapés.

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Affrontements évités de justesse

Face à la violation flagrante des critères et de la loi, le Collectif des jeunes pour la Refondation de San a porté l’affaire devant le Tribunal de San pour compromettre ladite attribution. « La justice a mis en dépens la superficie. Il y avait un grand risque d’affrontement entre les jeunes et les membres de la Société coopérative. Donc, la zone étant une zone d’insécurité, les Dozos sont partis mettre en garde les populations riveraines contre toute défiance de la décision de la justice. Ils ont dit que quiconque défiera la justice aura affaire avec eux », poursuit l’interlocuteur cité ci-haut.

Gouverneur, préfet, maire…bénéficiaires

Joint au téléphone, le président du Collectif des jeunes pour la Refondation de San, Mamadou Simpara, est revenu sur toutes leurs démarches infructueuses, faites auprès du Gouvernorat de San. « Après l’attribution, nous avons constaté, non seulement une violation flagrante des critères, mais aussi l’attribution de la majeure partie de la plaine à l’Administration : le gouverneur, le préfet, le maire, le président du conseil de cercle, les banques et autres », révèle-t-il.

L’affaire est portée devant le Tribunal de San par le CORESA avec des preuves à l’appui, sous la conduite de Me Dama Coulibaly, en décembre 2021. Le Tribunal a rendu son verdict invalidant l’attribution de la plaine en juin 2022.

« On salue infiniment le Tribunal de San, le courage du juge Dramane Kanté.  On n’avait même pas 50.000 FCFA sous la main. On était obligé de cotiser jusqu’à plus de 500.000 FCFA pour engager un avocat. C’est Me Dama Coulibaly qui a défendu avec brio le dossier pour nous. Il a été très gentil parce qu’au cours de la procédure il a fait beaucoup de va-et-vient, il nous a beaucoup arrangés », rapporte Mamadou Simpara, qui a poursuivi que si les juges arrivent à défendre les pauvres comme ça, c’est vraiment salutaire pour la justice malienne.

Ousmane Anouh Morba

Source : Nouveau Courrier

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